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20 août 2011 6 20 /08 /août /2011 13:16

   

            Madame D. avait 85 ans. Veuve depuis plus de trois ans, elle vivait seule dans un bel appartement où elle venait de s’installer avec son mari lorsque celui-ci est subitement décédé. Cette mort avait réactivé chez elle la douleur de la perte de l’un de ses enfants, décédé aussi subitement quelques jours après son mariage. Ses enfants et petits enfants conscients de la situation l’entouraient de toute leur affection et passaient la voir quasiment tous les jours.

 

            Madame D., très reconnaissante de toute l’attention que lui portait sa famille, n’avait plus envie de vivre pour autant ; Elle acceptait difficilement que ses forces la quittent et l’obligent à se ménager. Elle avait dû raccourcir le trajet de ses promenades et renoncer à faire des courses que ses enfants lui faisaient volontiers très régulièrement. A chaque visite elle me faisait part de son désir de partir : «  je ne suis plus utile pour personne, je ne sers plus à rien ». J’en concluais qu’elle ne vivait plus que pour son mari et qu’elle était entièrement à son service alors qu’elle en parlait comme d’un homme très actif jusqu’au dernier jour. Elle me confia même qu’elle priait parfois pour que Dieu la prenne. « Je sais ajouta-t-elle aussitôt, cela ne se fait pas, j’ai honte, mais je ne veux plus vivre ».

 

            Je l’encourageais à vivre toutes les fois que je la visitais relevant les bonnes choses qu’elle me rapportait. Je lui proposais des lectures, des émissions de télé ou de radio. Elle les écoutait parce que c’était une femme curieuse et intelligente. Elle savait discuter de tout et se tenait au courant sur les évolutions du monde. Mais rien n’y faisait ; l’envie de mourir était toujours là. Elle voulait mourir paisiblement dans son lit.

 

            Elle n’en eut pas l’occasion. Un été, alors que sa famille et tous ceux qui l’entourions régulièrement étions en vacances,  au cœur de la nuit elle se jeta dans la rivière qui passait au pied de son immeuble. La face contre terre dans une flaque d’eau. Elle périt noyée.

 

            Madame D, à la voix douce et aux gestes délicats avait dû utiliser la violence pour mourir. Elle n’avait pas d’autre  choix, elle qui voulait mourir coûte que coûte, que d’utiliser des moyens violents. Seuls quelques privilégiés peuvent se donner la mort en douceur : les médecins, pharmaciens, vétérinaires, quelques chimistes ou encore gens de pouvoirs. Pourquoi pas les autres. Devoir utiliser la violence pour se donner la mort me parait inacceptable. Au siècle dernier il y avait des poisons en libre circulation. Beaucoup de ruraux s’empoisonnaient à la taupicine, souvent à la suite d’amours déçus. Ces produits ont été retirés du marché libre.

 

            Certes, on objectera qu’il faut encourager d’abord les gens à vivre et que les solutions létales en libre circulation amèneront le suicide d’un dépressif qui demain irait bien et retrouverait le goût de vivre. C’est vrai. Une déception amoureuse peut être dépassée et il n’y a aucune raison à laisser mourir la personne déçue. Nous sommes dans une  toute autre situation lorsqu’une personne rassasiée de jours et souffrante nous dit vouloir partir. Ne doit-elle pas rester dans ce cas le maitre de sa vie. Récemment une vieille dame s’est donné la mort après en avoir averti son fils, homme politique connu et sa fille, philosophe ayant pignon sur rue. Pourquoi seuls quelques privilégiés auraient-ils cette possibilité ?

 

            Ce droit de choisir de mourir lorsque la vie devient une corvée est différent de l’euthanasie. Pour cette dernière c’est un autre qui demande la mort et non la personne concernée. Cet autre accomplit l’acte de mort. Dans ce cas un droit fondamental est violé. Aucune personne au monde ne peut avoir droit de mort sur une autre. Se pose alors le cas de ces malades -comme le cas Imbert- qui n’ont pas la possibilité de se donner la mort et la demandent à un autre parce qu’ils sont entièrement  dépendants des autres. Si mettre à leur disposition le produit et leur rendre le maximum des possibilités restantes afin qu’ils puissent eux-mêmes mettre fin à leur vie ne suffit pas, la demande  du malade doit être prise en compte, et étudiée avec la famille, l’équipe médicale  et des représentants de la justice.

 

            Il me semble donc impératif qu’un individu ne puisse pas choisir la mort pour un autre mais toute personne doit pouvoir choisir la mort pour elle-même sachant qu’il nous appartient à nous tous, les vivants, de les encourager à vivre sans les contraindre et les obliger mais en aménageant leur environnement et en manifestant beaucoup de tendresse à leur égard. Je dirai donc volontiers NON à l’Euthanasie active mais laissons choisir les malades qui malgré toute la compassion dont on a pu leur témoigner n’en peuvent plus et veulent mourir. Ayons la force d’accepter qu’ils puissent se donner la mort autrement que par des actes violents. Ne les obligeons pas à se pendre, se jeter d’une falaise, se noyer ou se tirer un coup de fusil. Il n’y a rien de pire pour eux, avec de surcroît le risque de se rater et de trainer par la suite culpabilité et lourd handicap à vie.

Et oui : il y a un moment pour vivre et un moment pour mourir.

 

            Enfin, je dirai qu’aborder la question de l’euthanasie et de la fin de vie sous l’angle du droit à mourir pour ceux qui ne veulent plus vivre tant la vie leur est insupportable ouvre de nouvelles façons d’aborder le sujet tout en le dédramatisant puisqu’il ne s’agit plus d’envisager la mort de l’autre mais de soi. Soyons plus courageux pour envisager notre mort et moins prompt à envisager celle des autres ! Un vieux Monsieur me disait un jour : « devant mes douleurs rhumatismales, ma mauvaise vue, ma surdité, mon isolement et j’en passe, j’ai souvent envie de mourir, je souhaite même ma mort, mais si à ce moment là un médecin se présentait à moi pour me faire une injection létale je dirais non et encore non ». Serait-il donc plus facile d’envisager la mort des autres que la sienne ? Je le crains.

 

Pour conclure je ne peux pas m’empêcher de penser Au Christ dont la force a été d’envisager sa propre mort pour refuser celle des autres. Oser mourir me semble être un des points forts de l’Evangile.

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13 août 2011 6 13 /08 /août /2011 22:37

 

            Chaque été les hebdomadaires en manque d’actualité politique publient des dossiers dont on ne sait trop comment ils sont choisis. Cet été le Nouvel observateur a-t-il publié son dossier sur les cathares en pensant aux rencontres des jeunes catholiques autour du pape à Madrid ?  Probablement pas. Des rapprochements peuvent toutefois être faits.

            Les cathares se sont développés dans le sud de la France sans manifestations visibles, uniquement par le bouche à oreille. Leur succès tient à leur indépendance refusant toute hiérarchie et tout encadrement. Ils pensent et décident seuls sans être tenus de se soumettre à une autorité religieuse quelconque. Ils aiment confronter leurs idées, s’interdisent tout prosélytisme laissant à chacun sa liberté de conscience. Les femmes sont au même rang que les hommes et peuvent exercer les mêmes fonctions sacerdotales qu’eux. Dans la vie quotidienne se sont leurs comportements, conséquence directe de ceux qu’ils prônent, qui font la différence. Enfin des gens qui vivent ce qu’ils prêchent ! On comprend la rage de l’Eglise catholique qui les a  excommuniés et exterminés jusqu’au dernier sans jamais revenir sur ces pages sombres de son histoire y compris  huit cents ans après.

 

            Aujourd’hui on pourrait penser que les mouvements dits « évangélistes » ont quelque chose de la tradition cathare puisqu’ils n’obéissent à aucune hiérarchie et qu’ils se retrouvent par petits groupes dont la « théologie » dépend uniquement du charisme du leader. Ce serait une erreur semble-t-il. Dans la plus part de ces groupes les femmes n’ont pas leur place en tant que leader et elles sont tenues à de nombreuses réserves qui ne concernent pas les hommes. Le prosélytisme est la base même de leur expansion, ils méprisent le dialogue puisqu’ils détiennent une vérité toute dogmatique. Leur comportement ne tranche en rien avec les habitudes sociales. Nous sommes bien loin des cathares.

 

            Qu’en est-il alors de ces jeunes catholiques qui semblent éprouver tant de joie à se retrouver et à se compter ? Tout d’abord ils ont une idole : le pape, C’est autour de lui qu’ils se retrouvent.  Voir le pontife justifie à leur dire tout déplacement. Ils suivent la doctrine de l’Eglise bien loin de toute critique et de toute contestation. Ils pensent comme l’Eglise. Enfin, l’important pour eux est de se sentir forts lors de ces rassemblements comme le désirent tous ceux qui adhèrent à une même idéologie qu’elle soit religieuse ou politique. Il n’y a pas le projet de vivre autrement sur tel ou tel point de société. Ici encore nous sommes loin des cathares !

              Mais que faudrait-il pour qu’un mouvement s’étende avec autant de force, de rapidité et d’énergie et touche toutes les classes sociales comme cela a été le cas avec les cathares ?

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16 juillet 2011 6 16 /07 /juillet /2011 13:58

          Que la campagne pour l’élection du président de la république soit une surenchère de promesses, c’est bien ce qui est à craindre. Après tout n’est-ce pas la nature même d’une campagne dans notre système électoral et tout particulièrement en ce qui concerne l’élection du président de la république au suffrage universel. Osons le dire, c’est une aberration dans un régime démocratique où les pouvoirs du sénat et du parlement, représentants du peuple sont réduits à la portion congrue et où le risque d’élire un incompétent dangereux et manipulateur n’est pas négligeable. En effet que ne ferait pas un élu pour garder son siège et tant pis s’il faut être le godillot d’un fou manipulateur. Oui, la république est en danger de part le fonctionnement même de nos institutions.

 

            Eva JOLY a bien compris qu’il est grand temps de redonner le pouvoir au peuple et en proposant un défilé citoyen pour le 14 juillet, elle commence par le commencement à savoir réunir celui- ci dans toutes ses composantes - y compris la militaire qui pour le moment est la seule représentée - et le motiver pour qu’il puisse élire ses représentants. N’est-ce pas ainsi que se forme un peuple ?

 

            Cette candidate aux prochaines élections a vu juste. La droite, bien consciente qu’elle ne représente pas le peuple et qui n’a aucun intérêt à ce que celui-ci, dans  toutes ses composantes participent au pouvoir s’épuise à chercher les pires méchancetés pour  discréditer la candidate. Beaucoup de ces propos - tenus par ses plus hauts responsables - sont considérés  comme des dérapages graves à connotations racistes et les déclarations du premier ministre n’ont rien à envier à ces chefs africains qui pour écarter une candidature de leur adversaires n’hésitent pas à jouer sur l’appartenance ethnique. On croyait une telle stratégie impossible  en France. Nous avons la preuve du contraire : Madame JOLY ne serait pas que Française !

            Quant aux responsables socialistes ils se montrent plus que décevants refusant même le débat et donnant ainsi raison à ceux qui pensent que droite et gauche c’est à peu près la même chose.

 

            Les propositions d’Eva Joly ouvrent  la voie à une réflexion sur les valeurs auxquelles tout un peuple peut se référer : la paix, la liberté, la fraternité, l’égalité… en s’appuyant sur l’histoire et des faits réels afin d’échapper à une pure théorisation de la pensée. Difficile dans ce cas d’accepter que les grandes formations politiques refusent le débat, voire le combattent. Craignent-elles de perdre des voix lors des prochaines élections ? Si oui, se  pose alors la question de savoir si le but d’un débat préélectoral est de récupérer des voix ou d’éclairer les citoyens sur tel ou tel sujet. De la réponse à cette question dépend l’intérêt de la campagne pour l’élection présidentielle qui s’ouvre devant nous.

 

En attendant, merci Mme JOLY de poser des questions intelligentes qui ne vous mèneront  probablement pas à la victoire électorale mais qui éveillent notre pensée et aident le peuple à sortir de l’obscurantisme dans lequel ceux qui nous gouvernent voudraient nous enfermer.

 

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15 juillet 2011 5 15 /07 /juillet /2011 21:50

 

 

Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son fils unique…Jean 3 16-18

 

            Nous avons pris l’habitude en lisant ce texte d’entendre que Dieu, dans son grand Amour pour nous, a permis que son fils soit tué à notre place. Jésus est la victime expiatoire comme cet agneau que les hébreux sacrifiaient pour effacer les péchés du peuple. Cette vision est celle du Nouveau  Testament qui présente le sang versé de Jésus comme le prix payé afin de nous racheter. On y trouve près d’une vingtaine de fois l’affirmation selon laquelle le sang de Jésus nous a racheté parce qu’il a donné sa vie en rançon pour nos péchés.

 

            Au XI eme siècle, un théologien célèbre justifiera cette thèse en s’inspirant du droit féodal. Il considèrera que l’Etre humain est un  mauvais vassal qui fait tort à Dieu son suzerain et que de toute façon, la majesté de Dieu étant infinie, l’humain n’a pas les moyens, y compris  par ses bonnes œuvres de réparer les dommages et l’injure faites à Dieu. C’est alors que celui-ci dans sa grande miséricorde envoie son fils pour payer la dette et l’indemnité que les humains ne peuvent régler. Dieu encaisse la rançon. Il y a expiation substitutive.

 

            Cette théologie de la croix pose question aujourd’hui et si elle était acceptable au premier siècle ou réexpliquée au moyen âge, elle semble indéfendable de nos jours. En quoi le supplice d’un innocent- Jésus- à la place d’un coupable satisfait-il la justice ? En quoi Dieu est-il miséricordieux puisqu’en livrant son fils il se préoccupe plus de sa gloire et de ses intérêts ? Si Dieu est un père aimant, peut-il se satisfaire de la mort horrible de son fils ? Enfin si pour sauver l’humanité Dieu a besoin de la mort de Jésus où est sa toute puissance ?

 

            Ces questions sont bien celles de nos contemporains. Elles ébranlent parfois le croyant et donnent raison à l’incroyant. Elles nous invitent dans tous les cas à reconsidérer cette théologie de la Croix qui se profile ici derrière ces quelques versets de Jean, théologie devenue si populaire que l’on a du mal à imaginer qu’il  puisse y en avoir une autre. Il nous faut pourtant replacer ces textes bibliques dans leur contexte ; Lorsque le nouveau testament parle du prix à payer cela avait du sens dans un monde où l’on pratiquait le marché des esclaves et où la liberté d’un humain s’achetait. Du jugement porté sur l’esclave dépendait sa valeur. De même, l’image de la victime tuée sur un autel était parlante puisque à cette époque on sacrifiait à des divinités pour obtenir leurs faveurs.

            Il nous faut donc considérer les textes bibliques comme des prédications et non  comme des dogmes et des doctrines. Ils  disent les choses de manière qu’elles puissent être comprises par les gens de l’époque suivant ce qu’ils vivaient et  pensaient. Il en est de même pour la théologie de Saint Anselme qui était une réactualisation du salut à partir des données de l’époque.

 

            Nous pourrions par exemple lire ces quelques versets de Jean en considérant que ce sont les hommes qui ont tué Jésus. Leur méchanceté, leur jalousie, leur soif de pouvoir religieux et politique sont à l’origine de la haine qui s’est déversée sur Jésus jusqu’à le faire mourir. De ce que voulait Dieu, nous n’en savons rien et il serait inutile, voire risqué de spéculer sur sa volonté et son pouvoir. Nous pouvons seulement constater que Jésus s’est comporté de manière tout à fait non violente et que s’il ne cherche pas la condamnation et la mort, il ne cherche pas à l’éviter parce qu’il est porteur de la paix comme il l’a montré tout au long de son ministère. On peut relever des indices d’hésitations, de difficiles combats, mais Jésus garde toute sa liberté pour mener au bout la mission qu’il croit être la sienne. Et lorsque Jean écrit que Dieu a donné son fils unique ceci ne signifie pas que Jésus n’est qu’un exécutant soumis à la volonté de Dieu mais un homme qui agit selon ce qu’il croit au sujet de la nature même de l’amour. S’il avait évité la mort nous n’aurions pas retenu tous ses actes qui ont marqué son ministère. Avec les techniques modernes, nous dirions aujourd’hui que par sa mort Jésus valide ce qu’il a dit et fait tout au long de ces trois années de ministère.

 

            Il nous est difficile de concevoir Dieu autrement que comme celui qui juge, qui tranche, impose sa loi, un Dieu qui sauve ou qui condamne selon son bon plaisir. Tout le message et toute l’attitude de Jésus consiste à nous sortir de cette ornière dans laquelle nous tombons quasi systématiquement. Il nous fait découvrir un Dieu qui ne manipule pas l’humain et celui qui croit en Jésus est débarrassé de cette image de Dieu. Celui qui ne croit pas à Jésus est soumis à l’image que les humains se font de Dieu. Verset 18 : « celui qui croit en lui n’est point jugé ; mais celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au nom du fils unique de Dieu ». Autrement dit, celui qui ne croit pas  à Jésus, reste prisonnier de la représentation de Dieu qui est installée dans le monde, il se sent alors jugé et pratique une religion qui l’asservit ou pense se débarrasser de Dieu en le niant mais continue à être tenaillé par le sentiment d’une condamnation. Le docteur Freud pensait au début de ses recherches que ses contemporains souffraient de sentiments de culpabilité à cause de leurs références au judéo-christianisme et de la croyance en Dieu. A la fin de sa vie il dût reconnaître que ce sentiment de culpabilité ne venait pas de la religion mais qu’il était inscrit au cœur même de toute conscience quelle qu’elle soit. Il ne s’agit donc plus de délivrer le croyant mais l’humain en général.

 

            Jésus se présente donc comme le serpent d’airain. Nombre 21 v 7-9. Tous les hommes sont mordus par la méchanceté, la jalousie mais quiconque regarde à Jésus est délivré du venin de cette morsure. Jésus est une sorte de remède au mal. C’est en regardant à LUI que l’on cesse de vouloir être Dieu et que l’on découvre ce qui reste à faire pour que tout le monde puisse vivre du mieux possible. Jésus n’a jamais voulu être Dieu mais il est reconnu comme tel de par la liberté avec laquelle il agit et de par les paroles et les actes qu’il pose. Mais ce Dieu là n’est pas celui de tout le monde et c’est ainsi qu’il sera rejeté et  crucifié par quelques uns et tout particulièrement par les plus religieux. Jésus nous détourne du désir de la toute puissance de Dieu pour nous ramener à l’acte d’amour. La puissance n’habite pas une divinité mais se trouve dans  l’amour que je manifeste aux autres.  Dieu se produit dans cet acte. Il jaillit de la relation établie avec mon prochain d’où l’insistance –par Jésus- de cette relation à l’autre.

            D’ailleurs n’est-ce pas la qualité de la relation que Jésus établit avec ceux qu’il rencontre qui nous amène à découvrir Dieu ? Et combien d’hommes et de femmes sont venus à la foi, non parce qu’ils ont été convaincu par une quelconque doctrine mais parce qu’ils ont   bénéficiaires et souvent seulement témoins d’actes d’amour. Je pense à cet homme que j’ai accompagné afin qu’il se débarrasse de son alcoolisme et qui quelques mois plus tard m’écrivait : «  Depuis que j’ai quitté votre centre j’ai trouvé la foi. Je n’aurais jamais imaginé pareille chose ». Je ne lui avais jamais parlé de Dieu, je n’ai jamais cherché à le convertir. Rejeté par les siens et ses proches –et comment en aurait-il pu être autrement car l’alcoolique est insupportable- il s’est soudain senti accueilli comme Jésus lui-même accueillait les voleurs, les tricheurs, les profiteurs du système religieux, social, politique, les prostituées et j’en passe. Dieu apparaît dans la rencontre bienveillante, c’est pourquoi on peut proclamer qu’il est amour. C’est ce qu’à vécu Jésus et c’est ce qu’essaie de dire l’apôtre Jean à ces interlocuteurs et à ses lecteurs.

 

            J’ajouterai pour terminer, et ceci dans l’intention non pas de critiquer mais d’interroger, que ces hommes et ses femmes qui découvrent Dieu à partir d’une relation d’amour à leur encontre ou dont ils sont témoins ont bien du mal à retrouver ce Dieu lorsqu’ils se présentent dans une Eglise. Ce dieu qu’ils ont expérimenté dans la rencontre leur semble tout à fait étranger à celui dont on parle dans l’Eglise. Ils ont rencontré un Dieu d’amour, un Dieu Esprit, et ils se retrouvent devant un Dieu de doctrine, figé préexistant à tout mais échappant à la rencontre ; Ils nous interrogent et nous ne pouvons que les entendre si nous voulons que nos Eglises puissent continuer dans la lignée dans laquelle Jésus les a inscrites.

 

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7 mai 2011 6 07 /05 /mai /2011 10:08

 

         Adolescents, nous chantions cette année là dans un camp d’été pour les jeunes : « le coq est mort, le coq est mort, il ne dira plus cocodi cocoda, il ne dira plus cocodi cocoda ». Les plus malicieux d’entre nous transformaient les paroles en « Le pape est mort, le pape est mort, il ne dira plus… ». Ils ne savaient pas que cinquante ans plus tard même mort, un  pape pouvait encore chanter. C’est en tout cas ce que l’on nous laisse croire avec la béatification de Jean Paul II. Les médias n’ont parlé que de cela pendant une semaine. C’est ainsi que nous avons eu droit à la grand messe avec le miracle d’une religieuse guérie par le pape défunt, à la procession devant le cercueil de celui disparu déjà depuis cinq ans, à l’ampoule contenant du sang du bien heureux Jean Paul II...et j’en passe.

 

         Loin de moi l’idée de ne pas respecter tous ces croyants rassemblés pour l’occasion à Rome ou devant leur poste de télévision. Je n’apprécie d’ailleurs pas tous ceux qui voudraient contester des traditions religieuses ou nous faire rire en se moquant des fondements même d’une religion quelle qu’elle  soit. Toucher à ces croyances c’est toucher à l’équilibre et à la part la plus intime de l’être de celui qui les partage. C’est pourquoi l’ironie et l’humour y trouvent rarement leur place.

 

         Mais respecter les croyances n’exclue pas de les interroger. Or, il faut bien constater que les médias se sont gardées de tout esprit critique comme si rites et croyances exposés au monde entier allaient de soi. Où est passé le réel et le rationnel dans cette affaire ? Faut-il enfermer des millions de téléspectateurs dans le surnaturel et le magique au mépris de la science ? Que devient la singularité du sujet lorsqu’on le confond ainsi avec une masse d’adorateurs et de pratiquants ? Ah, comme il est loin le siècle des lumières qui  nous avait sorti de l’obscurantisme du moyen âge ! L’inquiétant est que nous sommes peut-être en train d’y revenir  de part le dictat que des esprits religieux semblent imposer de plus en plus aux peuples de par le monde ,piétinant ainsi toute liberté de penser, d’écrire et de s’exprimer mais aussi de par cette illusion de consensus que nous croyons nécessaire pour avoir la paix.

 

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24 avril 2011 7 24 /04 /avril /2011 14:49

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            Je l’avoue bien sincèrement : lorsque je me lève de table après avoir mangé du poulet la culpabilité s’empare de moi. Elle m’assaille. Elle m’écrase. Elle ne me quitte plus. Etait-ce une histoire d’hormone ? Après le veau aurait-on inventé le poulet aux hormones comme Henri IV avait inventé la poule au pot ? J’étais à deux ergots de le croire lorsque subitement, après un voyage dans les pays du Maghreb j’ai enfin compris : le poulet est le seul animal qu’aucune religion n’interdit.

 

            Prenez le porc, il est banni par le Coran la Thora et tout ce qui s’y rattache. Ainsi près de la moitié de la population mondiale s’interdit de manger du porc. Ah l’heureux cochon qui n’a qu’une chance sur deux de finir sur un étal.

            Maintenant suivez la vache. Elle est sacrée en Inde. C’est peu, mais  le pays est grand si grand qu’il est bien difficile de dire combien de bêtes évitent ainsi de passer chez le boucher. Même le  taureau sur lequel tout le monde se précipitait au lendemain des corridas est menacé de disparition de nos boucheries tant les anti-aficionados deviennent nombreux. Seuls  restent encore quelques bœufs n’ayant pas vu venir les tracteurs. De quoi se casser les dents !

            L’agneau paraissait tout indiqué pour s’implanter dans toutes les assiettes. N’est-il pas l’animal de tous les sacrifices. Voilà qu’il est interdit aux femmes enceintes : risque de toxoplasmose. Autrement dit voilà encore un animal protégé.

            Restent les poissons persécutés par tous les pêcheurs du monde. Détrompez-vous. Le thon rouge a ses défenseurs : les écolos. 

            Mais qui défend le poulet ? Je vous le demande. Alors précipitons-nous pour fonder, au mieux, la religion qui interdit le poulet et pour le moins un courant philosophique le déconseillant vivement. Cet animal est sans défense. Il avait trouvé une parade, la grippe aviaire et voilà que celle-ci ne menace plus personne. De grâce, ayez pitié du poulet. Chérissez votre poule et cessez de la dévorer.

           

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19 avril 2011 2 19 /04 /avril /2011 15:43

         Cher Drisse,


         Je comprends ton inquiétude. Sache toutefois qu’un trou de mémoire n’est pas synonyme d’Alzheimer. Les médecins nomment cette affection « maladie de la mémoire » afin de n’effrayer personne. D’autres symptômes plus inquiétants accompagnent une perte de mémoire comme la répétition d’une question ou la réponse donnée  chaque fois avec la même précision ne semble pas enregistrée par le malade, des obsessions revenant régulièrement pendant plusieurs jours voire des mois, des prises de parole décalées par rapport au  sujet traité sur le moment.

 

         Au début de la maladie l’entourage croit à un changement de caractère ou de tempérament. La personne semble démultiplier ses qualités comme ses défauts. Son attitude comme son comportement deviennent de moins en moins supportables. C’est alors que se pose la question de la maladie. Les tests confirment. Chacun essaie de comprendre. Découvrir la maladie capte l’attention. Puis les réactions du malade deviennent de plus en plus inappropriées. S’opposer à ses dérives peut entrainer des réactions de violence difficiles à contenir.  Il peut  tout aussi bien se replier sur lui-même et ne plus communiquer avec l’extérieur. Le choix de ne pas le contrarier l’emporte le plus souvent. Très vite ce choix entraine une position tyrannique de sa part puisqu’il ne reconnaît aucune  limite. Cette tyrannie sera épuisante jusqu’à détruire ses plus proches qu’il semble ne pas reconnaître par moments. Le temps du placement arrive alors. Malgré la perte de raison, le malade dans une lucidité passagère, due peut-être au choc de l’annonce qu’il ne peut plus rester chez lui, refuse alors tout placement dans un service spécialisé. Le départ de la maison sera des plus difficiles pour ceux qui l’aiment et qui l’ont accompagné jusque là. Que de stratagèmes à mettre en place pour éviter la contrainte par force et combien il est difficile de ruser et mentir à ceux que l’on aime et que l’on respecte malgré la perte de la raison.

 

         Je ne sais pas mon cher Drisse si mes propos vont te rassurer. Tu peux toujours consulter un site médical pour avoir un tableau clinique précis de cette maladie. Ma lettre ne se veut pas un traité  scientifique, je l’écris à partir de ce que j’ai vécu et ressenti. Depuis que la personne concernée par la maladie est prise en charge par un établissement spécialisé, nous avons tous un très fort sentiment de liberté ce qui ne manque pas de nous culpabiliser. Sommes –nous libres au détriment des autres ? L’irrationnel serait-il l’ennemi de la liberté ?

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23 mars 2011 3 23 /03 /mars /2011 10:54

pot de confiture

 

         Pour être en vérité avec vous, je me dois de vous l’avouer : j’aime la confiture. Si tout le monde déteste la confiture, ce n’est pas pour autant que la confiture soit appréciée de tous. L’information n’est donc pas anodine. Seulement, voilà : Dans ce genre de produit, on ne trouve pas ce qu’on veut. Cherchez par exemple de la confiture «  Bon Papa ». Vous n’en trouverez pas. Il faudra vous contenter de la confiture « Bonne Maman ». C’est injuste. Oui, je sais c’est sans doute un rattrapage en faveur des femmes qui sont moins bien payées que les hommes à fonctions égales, qui n’accèdent que trop rarement à des postes de responsabilité avec des compétences souvent supérieures, qui sont très mal représentées dans les instances démocratiques. Elles tiennent leur revanche, elles ont leur confiture. C’est vrai aussi qu’elles font les confitures pendant que les hommes regardent la télé, lisent le journal ou pire encore sirotent un pastis au bar du coin. Tout de même. Je connais des hommes qui s’aventurent à faire de la compote de pommes. Leurs femmes ne font  que leur dire ce qu’il faut faire  très exactement après qu’elles aient épluché les fruits. Elles lavent la vaisselle quand tout est terminé.

 

         Alors, je lance un appel. Messieurs mettez vous à la confiture. Créez 

« la confiture Bon Papa ».  Enfin une confiture virile, une confiture qui en a …du goût. Et si Madame vous dit : « ta confiture est très macho » demandez lui plutôt : « Est-ce que tu l’aimes au moins, parce que moi tu sais,  la confiture « Bonne Maman » je l’aime beaucoup, je la trouve très douce ».

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21 mars 2011 1 21 /03 /mars /2011 22:42

           Dans un village, un forcené entra dans une école et prit en otage plusieurs enfants d’une classe maternelle. Armé jusqu’aux dents, non seulement il   menaçait de les tuer tous s’il n’obtenait pas satisfaction, mais pour montrer sa détermination, il n’hésita pas à en exécuter un.

 

         Devant une telle horreur chaque villageois proposait sa solution. L’un voulait allait détruire sa maison, l’autre incendier sa voiture.  Certains voulaient même se venger sur ses parents, ses enfants ou encore sur ses amis. Il fut même envisagé de détruire en partie l’école.

 

         Les autorités après avoir entendu toutes ces propositions et mesuré le désespoir des parents décidèrent  d’arrêter le forcené par tous les moyens y compris au risque de sa vie car pour eux, le plus important était de sauver la vie des enfants.  

         Peu de temps après, une unité spécialisée pour ce type d’intervention était sur place. Son responsable entra en communication avec le forcené. Le dialogue dura plusieurs heures. Aucune concession ne fut obtenue par le représentant de l’ordre public. Le  forcené qui ne se contrôlait plus devenait de plus en plus dangereux pour les enfants. C’est alors que les hommes de l’ordre, par le toit puis par les fenêtres tentèrent de pénétrer dans le local où, étaient retenus, les enfants. On entendit des coups de feu. Quelques minutes plus tard, les enfants étaient libérés. L’homme gisait sur le sol. Certain avancèrent qu’il s’était lui-même donné la mort.

 

         Un an s’écoula. Ce fait divers qui avait tant marqué les esprits était presque oublié. C’est alors que dans un pays à quelques milliers de kilomètres,  un dictateur agacé par les réclamations de son peuple décida d’exterminer une bonne partie de sa population. Il décréta qu’elle était composée de drogués et de terroristes. N’ayant pas trouvé suffisamment de partisans à sa solde, il fit appel à des mercenaires, distribua des armes et ordonna à son armée d’enter dans les villes et de  tuer tous ceux qui se trouveraient sur son passage.

 

         C’est alors que d’autres nations, horrifiées par le sang qui coulait voulurent intervenir afin d’arrêter le massacre. Mais les procédures pour obtenir l’autorisation d’intervenir étaient très longues. Il y eut des réunions et des discussions pendant des jours et des jours dans les quatre coins du monde. Et pendant ce temps le sang coulait toujours. Quand les nations purent intervenir il y avait déjà plus de huit mille morts soit près de  trois cents personnes par jour ayant perdu la vie depuis le coup de folie du dictateur. Les populations terrifiées célébrèrent l’intervention de ces nations jusqu’à ce que celles-ci leur fassent part de leur refus d’arrêter le tyran. Elles expliquèrent qu’elles avaient pour mission d’empêcher les méfaits de l’armée et des sbires du dictateur sanguinaire mais qu’en aucun cas elles devaient arrêter celui là. Avec leur puissante aviation et leurs missiles les nations détruisirent une bonne partie des installations du pays. Le dictateur et les siens, qui aimaient à parader, apprirent à se cacher et à se taire. Cela dura quelque temps. On avait l’impression que le pays s’était vidé de ses habitants. Plus personne ne sortait, tout le monde se cachait. Les avions se retirèrent, les missiles cessèrent de s’abattre sur leur cible. C’est alors que le dictateur  et les siens réapparurent, sans aucune blessure car ils étaient bien protégés dans leurs forteresses. Le ventre bien repu, les stocks de nourriture n’avaient pas été épuisés. Devant eux, ceux du peuple qui avaient résisté erraient comme des âmes en peine, affamées et en guenille. Fier de lui le dictateur  les assura qu’il ne les avait jamais oublié. Qu’il avait songé à se donner la mort mais que par compassion pour eux il s’y était refusé. Il leur proposa de les aider. Ils acceptèrent. La tyrannie pu continuer.

 

PS. Le même sort n’est pas réservé à tous les forcenés.

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20 mars 2011 7 20 /03 /mars /2011 17:36

 

            Il y a des textes tirés de la bible ou de la littérature en général qui ne demandent aucune explication pour toucher et les cœurs et les esprits. Dès la première lecture, ils atteignent l'âme pour utiliser un mot qui n'a guère plus cours mais qui est toujours bien compris. Nul besoin  de chercher à comprendre. Ils parlent d'eu mêmes. Vouloir les analyser et les expliquer peut  paraître déplacé.  Je me souviens d'un examen dans le cadre de la préparation de la licence en psychologie, où le professeur nous avait donné un texte du Cantique des Cantiques et nous devions démontrer que ce texte pouvait avoir un effet bénéfique sur la  relation amoureuse. C'était pour ce professeur un texte thérapeutique. Quelques étudiants s'insurgèrent alors refusant de commenter ce poème , ils y voyaient là un acte sacrilège, la poésie ne se commentant pas selon eux.

 

            Il est vrai qu'une œuvre d'art peut vous saisir ou, inversement, vous laisser indifférent et il est vrai aussi qu'un  texte peut fonctionner comme  une œuvre d'art.   L'art est un domaine sensible parce qu'il nous met en relation d'une part avec ce qu'il y a de plus profond en nous et d'autre part avec un ailleurs, un au delà, habituellement inconcevable et  inatteignable. L'art a une double dimension, celle de l'horizontalité qui nous lie aux humains et celle de la verticalité qui nous lie à ce qui, nous dépasse, nous transcende, en un mot :au divin.   Pour Hegel, philosophe protestant et Luthérien,  les grandes étapes de l'histoire de l'art, disent le progrès dans la manière dont les hommes se représentent leurs croyances, leurs valeurs, leur dieux. C'est ainsi que les hommes se  sont d'abord  figuré  Dieu sous les traits rieurs et enfantin d'un éléphant (c'est le dieu Ganesh)en Inde, puis en Grèce sous les traits équilibré de l'homme parfait qu'est Apollon (les statues de l'art classique) et enfin à partir du christianisme, Dieu est compris comme pur esprit, il n'est ni animal ni homme et il ne peut donc être représenté. Il se laisse entrevoir dans le regard, la position d'un personnage d'un tableau ou d'une sculpture par exemple. Toujours selon ce philosophe, l'art apparaît à la fin de l'histoire.  Alors qu'en est-il de ce texte biblique écrit au 1er siècle, au soir de l'époque classique (époque gréco-romaine) et à la veille de l'avènement du christianisme? Serait-il une sorte de charnière où les croyances aux dieux grecs vont basculer vers la croyance à un dieu esprit, unique, déjà  adorer chez les juifs, et réactualisé par Jésus? Ceci expliquerait que ce texte nous touche profondément, tel une œuvre d'art sans qu'il n'ait besoin de commentaires explicatifs. Il manifeste le passage d'un temps à un autre.

            Nous pourrions poser la question autrement: Ce texte - et plus particulièrement Jésus- nous fait-il passer d'une culture qui n'est autre que la culture de nos facultés naturelles comme le voulait les philosophes grecs - et comme le vivent les pharisiens prisonniers des lois faites par les hommes- ou à une culture qui est arrachement, rupture avec la culture naturelle, avec la réalité telle que nous la percevons?. Sommes nous invités à prolonger notre nature ou au contraire à la combattre ? Dans ce cas ce texte est libérateur puisqu'il nous arrache à une situation donnée et a un passé qui jusqu'ici ne faisait que se prolonger et se répéter. Pas étonnant alors qu'il nous fasse du bien simplement en le lisant.

 

            Essayons tout de même de pousser un peu plus loin  l'analyse et voir si à travers elle, nous retrouvons nos impressions immédiates.

            Ce  récit peut se diviser en deux tableaux:

            - D'une part, tout ce qui relève de la réalité telle que nous pourrions l'observer tous les jours:  un homme nommé Jésus, prend avec lui trois de ses disciples Pierre, Jacques et Jean et les emmène avec lui sur une haute montagne. Puis, étant donné ce qu'il a vu Pierre veut dresser trois tentes. C'était une coutume pour célébrer la fête des tabernacles. Enfin les disciples sont saisis d'une grande crainte étant donné ce qu'ils pensent voir,  ils tombent face contre terre.

            - D'autre part, il y a tout ce qui parait irréel, non conforme à ce qui peut advenir naturellement: Jésus est transfiguré, son visage resplendit comme les soleil, ses vêtement deviennent blanc comme la lumière ; Moise et Elie, morts depuis plusieurs siècles s'entretenant avec Jésus apparaissent aux disciples.

 

            Nous avons l'habitude, et les commentaires que l'on peut consulter sur internet le montrent, de diviser le monde entre ce qui est naturel, connu et expliqué par la science, que tout le monde peut observer ou comprendre, et ce qui est surnaturel comme les miracles (les guérisons miraculeuses) et les apparitions ( celles de la vierge Marie sont les plus courantes). Seuls quelques uns ont accès aux événements surnaturel. Ils ne relèvent pas d'une observation universelle.

            Si l'on s'en tient à cette vision des choses, soit on ne croit pas au surnaturel et ce texte peut être classé parmi les légendes et les textes du merveilleux, soit on y croit mais on a du mal à voir ce que cela peut nous apporter aujourd'hui. On se dit que les disciples ont bien eu de la chance mais que cela ne nous est pas encore arrivé. C'est comme les numéros gagnant du loto: on espère toujours, on ne sait jamais. Mais en attendant le gros lot, il ne se passe pas grand chose, il n'y a pas de changement dans la vie. Elle est toujours la même.

           

            Je propose ce nous pourrions appeler une troisième voie, en tout cas une autre manière d'appréhender ce qui se passe ici avec Jésus et ses trois disciples. Cette approche me semble par ailleurs s'enraciner pleinement dans l'esprit de la réforme. En effet, celle-ci a toujours été très prudente vis à vis du surnaturel qui pour elle relève plus du religieux que de la foi. Il y a même des courants théologiques qui rejettent catégoriquement le surnaturel, il est pour eux un obstacle à la foi. Cette troisième voie me paraît assez simple: les disciples vivent ici avant l'heure (puisque Jésus n'a pas encore était crucifié) l'expérience d'une vie avec le Ressuscité. Autrement dit ils expérimentent ce que nous pouvons vivre aujourd'hui avec Jésus-Christ ressuscité à savoir la présence même de Dieu à leur coté. Cette présence nous fait voir et ressentir le monde, tout autrement que ce que nous avons l'habitude de percevoir. La réalité du monde est transfigurée. Non seulement le monde présent avec ses bonheurs (Pierre veut s'installer sur la montagne) et  avec ses drames (les disciples sont saisis de crainte) mais aussi le monde passé (Moise et Elie apparaissent ici dans leur fonction, l'un comme porteur de la loi, l'autre comme précurseur du Messie rétablissant l'alliance par la douceur et la consolation). Quant au monde à venir il n'est pas seulement une espérance hypothétique, il commence ici et maintenant parce que les humains ont la possibilité de le construire dans la présence du Christ ressuscité. Rien à voir avec le numéro éventuellement gagnant du loto, rien à voir avec une attente et une espérance qui n'en finissent pas, fige la vie et l'enferme sans que rien de nouveau ne se passe.  Cette présence du Christ ressuscité apparaît ici sous la forme d'un visage transfiguré, resplendissant comme le soleil, avec des habits blancs comme la lumière. Nous avons ici la description des humains tels qu'ils doivent nous apparaître toutes les fois que la nuée lumineuse les recouvre eux aussi; Ces visages les voyons-nous? Cette vision est pourtant la condition pour que le monde puisse vivre en paix et réconcilié.

            En conclusion , je retiendrai deux idées majeures à la suite de la lecture de ce texte;

                        Tout d'abord, lorsque un récit nous touche, recevons le tel quel. Ne cherchons pas toujours à comprendre et à expliquer. Trop souvent je me suis entendu dire: vous pasteur vous savez, pas moi. La foi n'est pas seulement de l'ordre du savoir même s'il ne doit pas être négligé. La foi nous pousse à chercher. La foi est aussi l' accueil  fait à la parole . La foi c'est  laisser tomber toutes les résistances pour se laisser toucher par ce qui m' est étranger, va peut-être bouleverser mes croyances, ma civilisation personnelle avant de toucher la civilisation en général. Nous l'avons vu c'est ce qui s'est passé avec Jésus. Des vies sont bouleversées, les croyances changées et les valeurs réaménagées. Une ère s'est terminée, une autre a commencé.

                        Enfin, ne nous laissons pas emporter par le côté surnaturel du récit. Le passé ne l'a pas été plus que le présent et le futur ne le sera pas davantage. Les textes de la bible n'ont pas été écrit pour nous rapporter des événements ou la raison n'aurait pas sa place, où elle serait supplantée par le merveilleux. Les Evangéliste comme souvent les auteurs de manière générale, écrivent des textes comme les impressionnistes faisaient des peintures. Ils utilisaient des couleurs surréalistes qui n'avaient rien à voir avec la réalité , traçaient des lignes qui n'en étaient pas parce qu'ils voulaient communiquer des impressions, des vérités au delà de la vérité. Avec ce récit de la transfiguration, les Evangélistes nous communiquent une impression, une vérité au delà de la vérité bien plus puissante qu'un simple fait rapporté  par le meilleur des reporters. La preuve , ce récit -et d'autres- a traversé l'histoire, bientôt 2000 ans et il nous émerveille toujours.  Le merveilleux, c'est de marcher avec Jésus -christ ressuscité. C'est alors que nous recevons tous ses bienfaits; c'est alors que nous voyons les visages transfigurés, notre monde se transformer et poindre le royaume de Dieu dès ici-bas ;

                                                     Rochemaure le 15 mars 2011

                                                                     Serge SOULIE

 

Siracide 45/ 1-5 et 48/ 4-10     Mat. 17/1-9  .   

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Qui suis-je ?

     Titulaire d'une maitrise de théologie et d'un DESS de psychopathologie clinique, j'ai été amené à exercer plusieurs fonctions  et plus particulièrement la mise en place d'un centre socio- culturo- spirituel protestant puis la direction pendant 12 ans d'un centre de cure pour malades alcoliques. J'y ai découvert l'importance d'apprendre à écouter l'humain dans toutes les dimensions qui le constituent. Aujourd'hui, inscrit au rôle des pasteurs de l' Eglise Réformée de France, j'essaie de mettre des mots sur mes expériences et de conceptualiser mes découvertes.
serge soulie

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