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14 février 2021 7 14 /02 /février /2021 11:26

 

 

            Les autorités suisses ont annoncé la mort de Béatrice Stöckli détenue par Aqmi au Mali avec la française Sophie Petronin, deux italiens et un opposant au gouvernement  Malien. Elle aurait été tuée par ses ravisseurs avant même la libération des quatre autres otages.

            Madame Stochli était une missionnaire protestante suisse. Elle avait été enlevée à Tombouctou quatre ans auparavant. Les causes de sa mort sont inexpliquées alors que les quatre autres otages cités ci-dessus ont été libérés.  Il semblerait, selon l’otage français, qu’elle était souvent en conflit avec ses geôliers qui ne la supportaient plus. Certains avancent qu’elle n’avait pas renoncé à les convertir à la foi chrétienne. Elle aurait été arrêtée pour la deuxième fois en 2016 parce qu’elle distribuait des bibles aux musulmans. Son église lui avait vivement déconseillé de se rendre en terre d’islam mais au nom de ses convictions elle n’avait pas tenu compte de ces conseils.

            L’histoire est jalonnée de chrétiens  morts à cause de leur foi. Aux premiers siècles de notre ère ils étaient jetés dans la fosse aux lions. Au temps de la Réforme, ceux qui refusaient d’abjurer étaient envoyés aux galères ou exécutés. Dans tous les cas le prosélytisme était interdit et sévèrement puni comme c’est le cas aujourd’hui dans la plus part des pays musulmans.  

            Il est difficile d’entrevoir les raisons pour lesquelles cette femme a été exécutée. Le fait qu’un prêtre s’abstenant de tout prosélytisme ait été libéré peut laisser supposer qu’elle a perdu la vie pour des raisons religieuses. Depuis les commentaires ne manquent pas. Notre missionnaire suisse est adulée pour son courage, sa foi et son entêtement à vouloir convertir les musulmans. Ah, si seulement les protestants pouvaient témoigner jusqu’à perdre leur vie ! Une de mes cousines se penchant sur l’histoire des camisards dans les Cévennes, était horrifier d’apprendre qu’un de ses ancêtres avait abjuré pour sauver sa vie ! Inversement Sophie Pétronin est montrée du doigt par ceux-là même qui sont éblouis par notre missionnaire suisse. Rendez-vous compte, elle est même allée jusqu’à se convertir à l’islam ! Elle a déclaré à son retour parlant de ses geôliers « J’ai été très respectée. Ils ont pris soin de moi. Ils ont appelé un médecin qui est venu plusieurs fois lorsque j’ai été malade. J’ai beaucoup prié, fait de la relaxation et cherché de l’énergie ».  Intolérable pour certains.

            D’abord respectons en effet le choix de notre missionnaire. Elle a assumé jusqu’au bout son prosélytisme allant jusqu’à la mort. Elle devait se douter de ce qui l’attendait. Elle n’a pas reculé. Enfin, comment porter un jugement sur l’attitude de ceux qui se trouvent dans une telle situation. Ayons l’humilité de dire que nous n’en savons rien. Mais raisonnons de la même manière pour Sophie Pétronin. Si elle a fait le choix, selon les médias, de se convertir à l’islam respectons ce choix. Elle a beaucoup prié nous dit-elle. Et peu importe que cette conversion soit sincère ou contrainte. Telle a été sa décision dans une situation compliquée. Par ailleurs, sans confondre la position de cette femme avec le  syndrome de Stockholm selon lequel l’otage prend parti pour ses geôliers, n’est-ce pas un acte d’amour que cette femme a posé à l’égard des siens. Elle n’a pas mis en avant ses convictions, son idéologie, sa croyance ou son incroyance, elle a posé un acte correspondant à la situation du moment, un acte adéquat. Ses gardiens aussi. Ils ont pris soin d’elle jusqu’à la conduire chez un médecin. On ne le dira jamais assez combien : un acte de bienveillance envers un ami ou un ennemi se rit des convictions de chacun aussi fortes soient-elles. Les idéologies séparent, les actes d’amour unissent. Ils n’ont pas de religion. Dans l’évangile, Jésus nous dit qu’il faut aimer nos ennemis, tendre l’autre joue quand on nous gifle et donner tous nos vêtements à celui qui vole notre tunique. Madame Peronin a fait comme l’évêque à qui Jean Valjean, forçat irrécupérable, avait volé les chandeliers. Pour le couvrir il a déclaré les lui avoir donnés. Quant à l’apôtre Paul, il n’hésite pas à rappeler aux Corinthiens  (2) qu’il s’est fait tout à tous pour en sauver quelques-uns. Il s’efforce en toutes choses de complaire à  tous, cherchant non son avantage mais celui de tous.   Autrement dit, il s’est mis  à la place de l’autre afin de partager avec lui. Bref ! Une communion humaine avant même toute communion religieuse.    

            Dire qu’il faut aimer ses ennemis est très audacieux. C’est ce que semble ne pas avoir compris certains commentateurs. Cette compréhension passe par l’abandon de la croyance selon laquelle notre religion serait la meilleure, qu’elle soit juive, chrétienne, musulmane ou autre. Que chacune puisse nous conduire toujours vers plus de considération et d’amour pour ceux qui sont autour de nous. Tout geste d’amour est facteur d’unité.

  1. Victor Hugo : les misérables
  2. 1 Corinthien 9  V : 22 et 10 V : 33
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Qui suis-je ?

     Titulaire d'une maitrise de théologie et d'un DESS de psychopathologie clinique, j'ai été amené à exercer plusieurs fonctions  et plus particulièrement la mise en place d'un centre socio- culturo- spirituel protestant puis la direction pendant 12 ans d'un centre de cure pour malades alcoliques. J'y ai découvert l'importance d'apprendre à écouter l'humain dans toutes les dimensions qui le constituent. Aujourd'hui, inscrit au rôle des pasteurs de l' Eglise Réformée de France, j'essaie de mettre des mots sur mes expériences et de conceptualiser mes découvertes.
serge soulie

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