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5 novembre 2019 2 05 /11 /novembre /2019 21:40

 

           Aujourd’hui, il y a de moins en moins de participants aux offices religieux, tout particulièrement aux messes et aux cultes, alors que les groupes de méditation sont de plus en plus nombreux. Ceci ne veut pas dire que les adeptes des offices religieux se dirigent vers la méditation. Le plus souvent les chrétiens qui délaissent l’église ne cherchent pas à remplacer les moments cultuels. Ils se tournent en priorité vers des activités sportives comme le footing, ou de loisirs comme la pêche ou la chasse.  Quant à ceux qui se tournent vers la méditation, ils ne cherchent pas à retrouver  les habitudes de l’église ou du temple, habitudes  qu’ils n’ont jamais connues dans la plupart des cas.

            Pour faire court nous dirons que l’office religieux oriente vers Dieu qui est extérieur à l’homme. Il invite à lever les yeux vers le ciel et à prier dans l’attente d’un exaucement venu d’une puissance extérieure. La méditation recentre la personne sur elle-même, sur son corps et sa pensée. Les séances invitent à prendre conscience des parties du corps les unes après les autres,  à regarder l’évolution de sa pensée  et à s’intéresser à sa respiration.

            Ces deux activités, l’une tournée vers le ciel et l’autre vers la terre ne semblent jusqu’ici ne rien présenter de commun. Certes dans l’église on parle de méditation mais celle-ci reste tournée vers Dieu. L’humain y est invité à s’oublier pour faire la place à Dieu.

            Cette impossibilité de mettre en perspective messe ou cule  et méditation moderne vient essentiellement de la conception que la plupart des croyants ont de Dieu. Le Dieu de l’opinion et des croyances qui est le leur, mais aussi celui des incroyants, est un Dieu où  l’humain et le divin ne peuvent se mêler. L’interprétation habituelle du  mythe de la création laisse entendre que Dieu et l’homme sont séparés. Le fait que l’homme soit construit  de terre mais aussi de souffle divin, n’est pas retenu. Le souffle devient autonome, il n’est pas Dieu en l’homme. Tout se passe comme si la parole créatrice avait séparé le créateur de la créature.  La pensée chrétienne pose Dieu en dehors de l’homme. Offices et prières s’adressent à un Etre extérieur. Dieu n’est pas invité à se mêler au corps et à l’esprit de l’homme. Il est invité à intervenir depuis la place où il se trouve sans s’incarner dans les humains.  

            Une conception qui penserait  Dieu, non comme un être parfait, fini, étranger à  la création,  mais présent dans le réel et en toute chose, absolument infini, plus simplement comme esprit pour le dire comme Jésus à la samaritaine, pourrait non seulement concilier prière et méditation mais encore, enrichir l’un par l’autre.  Imaginons une méditation où l’homme ne travaillerait pas seulement avec son corps mais offrirait ce corps au divin. Une méditation où il ne respirerait pas seulement de l’oxygène et de l’azote mais l’esprit du divin. Une méditation où le divin,  présent dans le corps et l’âme de chaque être serait ressenti comme une réalité. Faciliter l’incarnation du divin dans tout ce qui existe, êtres et choses, sachant que cette présence divine en chacun de ces « étants » assurerait des apports différents dans le monde. La méditation ainsi pratiquée fera du corps un corps vivant parce que humain et divin y seront mêlés.  

            L’apôtre Paul ne dit pas autre chose lorsqu’il invite à offrir son corps en sacrifice vivant et saint. Le Dieu de la bible ne se perçoit qu’à travers les intuitions de ceux qui s’y réfèrent et pas à travers ce qu’ils en disent. L’humain ne peut pas se saisir de Dieu. Y compris les prophètes et les  saints. Ils disent beaucoup de bêtises au sujet de Dieu. Mais au-delà là  leurs paroles, il y a l’intuition du vrai Dieu, qui paradoxalement ne peut être déclaré comme vrai, au risque d’en faire une idole.  Dieu ne peut être saisi qu’au-delà des perceptions par les sens et par la pensée. Les mots ne peuvent pas dire Dieu. La présence de Dieu est comme un souffle. Il n’est pas possible de l’enfermer, ni dans une idéologie, ni dans une boîte, ni dans un édifice aussi religieux soit-il. La présence de Dieu est en tout et tout est en Dieu.

            Concrètement, se pose la question du comment vivre ce temps de méditation où le divin aurait sa place. Le plus simple serait, en tous les cas pour les protestants, de repenser le culte afin qu’un temps -qui pourrait se substituer à ce que nous appelons liturgie et qui n’en serait qu’une nouvelle modalité, intègre à la fois les exercices corporels et les paroles manifestant la présence du divin. Cette présence serait mentionné tantôt comme intérieure à soi, tantôt comme extérieur. Les religions telles le christianisme et l’islam connaissent déjà des postures particulières pour la prière par exemple. Ces postures sont des postures de soumission à Dieu. Le priant pour s’attirer les faveurs de Dieu s’incline, se met à genoux, s’accroupit comme si Dieu ne pouvait regarder à lui que lorsqu’il est dans une position de faiblesse et de servitude. Dans la méditation de pleine conscience rien de toutes ces pratiques. Tout au contraire, la concentration sur les différentes parties du corps facilite l’harmonie de celui-ci ainsi que l’occupation de l’espace.  Des textes actuels pourraient  bien sûrs être repris. Faire participer le corps ne peut que leur donner du relief.  Le plus difficile sera d’accepter et faire comprendre qu’il est utile de  mettre le corps à contribution.  L’installation de chaises ou de bancs n’étant pas très pratique, les exercices devront être adaptés. Toujours dans le cadre de la vie spirituelle il est possible d’organiser ces moments de méditation comme on le fait pour une réunion de prière. Ce sera un temps où l’on se rend attentif à la présence de Dieu par le silence, le travail du corps et la parole. Il ne sera pas question d’adoration, de louange ou d’intercession mais d’un abandon de son ego pour se laisser transformer et préparer à l’accueil de l’autre qui devient ainsi mon prochain.

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Qui suis-je ?

     Titulaire d'une maitrise de théologie et d'un DESS de psychopathologie clinique, j'ai été amené à exercer plusieurs fonctions  et plus particulièrement la mise en place d'un centre socio- culturo- spirituel protestant puis la direction pendant 12 ans d'un centre de cure pour malades alcoliques. J'y ai découvert l'importance d'apprendre à écouter l'humain dans toutes les dimensions qui le constituent. Aujourd'hui, inscrit au rôle des pasteurs de l' Eglise Réformée de France, j'essaie de mettre des mots sur mes expériences et de conceptualiser mes découvertes.
serge soulie

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