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9 janvier 2018 2 09 /01 /janvier /2018 19:37

 

            Pour réduire le nombre de morts sur la route, le gouvernement vient de décider une réduction de la vitesse de 90 à 80 km/h sur les routes secondaires autrement dit partout sauf sur les autoroutes et les quatre voies. Aucun argument sérieux ne semble déterminant pour dire si cette mesure sera efficace ou pas. A titre personnel je crains que, à quatre-vingt kilomètres heure nous nous endormions sur ces kilomètres de route droite. Avec le confort des voitures actuelles et le ronronnement du moteur, à cette vitesse-là comment résister au sommeil ? Pour autant, cette vitesse est-elle suffisamment basse pour ne pas aller s’écraser sur un engin agricole roulant insolemment  à moins de vingt kilomètres heure ? Il est à craindre que derrière les arguments avancés par le gouvernement se cachent des raisons bien moins nobles. Il est à souhaiter que ces limitations de vitesse soient bien signalées. Mais ne nous leurrons pas, la marée chaussée aura des occasions supplémentaires pour tendre les guets apens aux automobilistes étourdis.

            Il est heureux que l’utilisation des portables soit plus durement sanctionnée. Pas besoin de rouler très longtemps pour s’apercevoir que la voiture devant vous est pilotée par un chauffeur plus préoccupé par son téléphone que par la conduite de sa voiture. Si vous êtes derrière, il ne vous reste plus qu’à vous armer de patience et rouler au rythme de l’autre tout en évitant de le suivre dans ses zigzags. En revanche il est lamentable que l’alcool ne soit pas pris au sérieux alors qu’il est à l’origine du plus grand nombre d’accidents et de morts. Plus du tiers nous dit-on. En fait personne n’en sait rien. Si des tests sont faits lorsqu’il y a des accidents graves, rien n’est vérifié pour les accrochages sans atteintes corporelles.  Mieux encore il m’est arrivé que lors d’un contrôle pour la vitesse le gendarme demande si j’avais bu de l’alcool. J’ai répondu non. Il ne m’a pas fait souffler ce qui montre d’ailleurs que son but n’est pas de contrôler l’alcool mais de vous accabler d’une amende parce que la vitesse était limitée sur cette portion de route et que vous ne vous en étiez pas rendu compte, la signalisation étant à minima. Trop de signalisation ne lui aurait pas permis de vous piller le porte-monnaie car vous auriez baissé votre vitesse.  

            Soyons clair : dans notre pays l’alcool est intouchable. Dans de nombreux pays d’Europe le taux d’alcool autorisé est de ZERO. En France nous en sommes à  0,5 grammes par litre de sang, comme si cette quantité était inoffensive. La plupart des français pensent que l’alcool ne fait effet que pris en grande quantité. Pour eux l’alcoolique est celui qui roule sous la table ou celui qui est rond comme une queue de pelle comme le chante Pierre Perret. Or on peut ne jamais être saoul mais avoir la conscience et le discernement totalement altérés par une quantité d’alcool bien moindre et variant selon les personnes. Plus de soixante-dix pour cent des faits divers sont dus à un abus d’alcool. Le dernier en date est celui de ce père de famille qui enlève son enfant de l’hôpital alors qu’il est très malade et en grand danger. Il n’était pas saoul. Il avait perdu la raison. L’alcool sert dans de nombreux cas à passer à l’acte. Pas besoin d’être pris en trop grande quantité. Il suffit qu’il altère les capacités mentales.

            Avoir fait de l’abus d’alcool une maladie n’aide pas à mettre en place avec  celui-ci un rapport pertinent. L’alcoolique se trouve placé devant une alternative : soit arrêter toute consommation d’alcool, soit continuer à boire et mourir. La médecine n’a pas d’autre moyen que de prôner l’abstinence. Cela peut marcher pour ceux dont la dépendance amène à être ivre en permanence et qui sont desincérés socialement dans le travail comme dans la famille. Ceux pour qui l’alcool est l’adjuvant de leur folie passagère, qui boivent parce qu’ils n’ont pas trouvé une passion plus forte que la prise d’alcool et se retrouvent sans moyens pour échapper à leur pulsion. Ils ne sont pas malades mais souffrent d’un trouble existentiel qui n’a pas sa solution dans le médical. Ce trouble ne peut s’estomper qu’à partir d’un travail sur l’esprit qui pense, cherche, crée et responsabilise.  Un tel travail est bien loin du travail actuel des services d’alcoologie qui coûtent très chers et ne sont adaptés qu’à une petite partie des personnes concernées par l’abus d’alcool. Dire à une personne qu’elle n’est pas malade c’est rappeler et redonner de la force à l’élan de vie qui est en elle et qui se croyait mort et sans futur. C’est mettre en route le désir qui anime chaque humain. Ce désir se nourrit de la présence des autres comme l’ont compris tous ces mouvements qui se refusent à médicaliser la dépendance à l’alcool et qui insistent sur les moments de vécu commun où chaque participant peut entrer dans une recherche de vie avec les autres. Ces mouvements écrasés par le médical et manquant de renouvellement dans leurs pratiques sont en perte de vitesse. Dommage !

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5 janvier 2018 5 05 /01 /janvier /2018 11:05

 

           Au moment où le Pacs a été voté par la chambre des députés, les français n’y étaient pas favorables pour les personnes du même genre. Puis il est entré dans les mœurs et la grande majorité l’a accepté. Avant 2012 les sondages donnaient les français plutôt favorables au mariage des personnes du même sexe. Après que le gouvernement se fut saisi de l’affaire, que des évêques soient intervenus et que l’extrême droite ait mené une campagne agressive les français semblaient avoir changé d’opinion. L’idéologie la plus bruyante l’avait emporté. Puis, Le Président Macron s’est employé à supprimer les clivages existants entre les partis, le domaine politique s’est apaisé. Les français ont pu penser et s’exprimer librement sans être soumis aux idéologies politiques et religieuses. Les journalistes ont été les premiers bénéficiaires de ce changement. Lorsqu’ils interviennent ils le font hors toutes pensées partisanes. Leurs analyses sont bien plus justes et plus pertinentes.  L’auditeur ne sait plus s’ils sont de droite ou de gauche. Et pour cause, ils ne se considèrent plus comme porte-parole de telle ou telle idéologie. Ils s’intéressent à la réalité des faits et leur analyse personnelle prend le dessus. Enfin des idées qui sont vraiment les leurs !

            Il en va de même pour la PMA et la GPA. Les français donnent leur opinion sans se soucier de plaire à tel ou tel parti. C’est ainsi que très minoritaires à l’approuver ils sont devenus largement majoritaires selon les derniers sondages. On réfléchit mieux dans un climat politique très apaisé. Il appartient désormais au gouvernement de piloter la mise en œuvre de ces dispositions tout en évitant que les clivages se reconstituent. Ce serait regrettable et très dommageable pour tous.

              Parmi les croyants pratiquants, les sondages ne donnent pas une majorité pour la mise en œuvre de ces deux dispositions. Les responsables religieux vont tenter de faire reculer le gouvernement et retourner la population à leur avantage. Il n’est pas impossible qu’ils y arrivent, le président Macron  n’étant pas favorable à la GPA. Tout dépendra du rapport du comité d’éthique et de l’autorité qui lui sera accordée. Les croyants pratiquants font confiance à Dieu, le reste de la population fait confiance à l’humain. Cette différence d’attitude est capitale. Le croyant procède par interdit. Il craint de  déplaire à Dieu. Il s’imagine ne pas faire ce que Dieu demande. Il se dit : « Laissons les choses en l’état, Dieu sera satisfait puisqu’il l’a été jusqu’à aujourd’hui ».  Du moins le croit-il. Le non croyant ou l’agnostique, invitera à la réflexion pour que PMA et GPA puissent fonctionner du mieux possible pour rendre les gens heureux sans nuire à autrui. Il prendra en considération les progrès de la science et les expériences vécus ici ou ailleurs, dans les autres pays par exemple. Pour ce qui est de la GPA, la plus contestée, il cherchera à établir un cadre précis précisant les conditions pour être mère porteuse, les dédommagements afférents, l’évaluation des risques etc… Ce devrait être le rôle du comité d’éthique qui ne peut s’en tenir à une autorisation et à des considérations morales. L’éthique ne travaille pas sur l’idéologie mais sur le réel, le vécu, la mise en place de l’indispensable pour que la chose soit possible.  Un grand pas sera fait à l’image des lois sur l’avortement qui évitent bien des drames et fait avancer l’humanité.

            Enfin pour terminer un rappel à tous ceux qui ne voulant ne se référer qu’au texte sacré, rejette la  PMA et la GPA. Qu’ils se souviennent d’Abraham. Craignant de ne pas avoir d’enfant il en fait un à sa servante. L’époque ne disposait pas de la fécondation in vitro. Abraham utilise la seule solution possible. Quant à Jacob, c’est à la GPA qu’il a recours. Sa femme Rachel, ne pouvant pas avoir d’enfant lui dit : « va vers ma servante Bila, qu’elle enfante sur mes genoux et que par elle j’ai aussi des fils ». La servante a bien été une mère porteuse.  Gênée, la bible en Français courant a traduit « je les adopterai » au lieu de « sur mes genoux ». Bien évidemment ne cherchons pas à justifier les décisions à prendre aujourd’hui à partir de textes anciens. Cette méthode est insupportable. Elle est une négation de la modernité, de l’intelligence, du progrès et de l’évolution naturelle de la création elle-même. Constatons seulement que les humains ont toujours été ingénieux avec les moyens de leur époque pour répondre à leurs besoins et à leurs désirs. Nous n’avons pas à juger. Aujourd’hui GPA et PMA semblent être les moyens les plus appropriés pour répondre à certaines situations.

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3 janvier 2018 3 03 /01 /janvier /2018 21:36

 

               Une policière tombée à terre se faisant tabasser lors d’une intervention dans une bagarre et voilà les médias montant en épingle l’évènement, les politiques surenchérir sur l’inacceptable  et un syndicat de police reprenant des thèmes peu démocratiques. Disons-le tout de suite.  Il est  inacceptable qu’une policière totalement innocente soit frappée violement, elle aurait pu perdre la vie. Bravo pour ce jeune adulte qui l’a aidée à se relever et l’a accompagnée.  Les coupables doivent être sévèrement punis.

                Mais attention au dérapage. Il serait dangereux pour la démocratie, à partir de ce tragique évènement, de céder aux sirènes du « toujours plus de répression » et de la mise à l’écart des juges en réclamant des peines planchers par exemple. La justice doit continuer à juger à partir de chaque situation, au cas par cas,  après instruction et selon la loi qui définit la nature et la hauteur de la peine en fonction des circonstances du délit commis.

                Faire de la police et des forces de l’ordre comme le voudrait Monsieur Estrosi, qui s’exprimait sur cette affaire à la radio, un corps sacré est très dangereux. Il est surprenant qu’un responsable politique ait de telles idées et ne puisse pas prendre du recul vis-à-vis de ce drame.  Rien de ce qui vient de l’homme ne peut être sacré autrement dit intouchable. Les pays où la police et autres corps de l’état sont intouchables ne sont pas enviables pour ce qui est de la liberté et du bonheur des citoyens. Une république n’a pas à devenir dictatoriale. La gravité de la lutte sans merci qui doit être menée contre le terrorisme et qui justifie des mesures exceptionnelles ne doit pas soustraire policiers et gendarmes aux priorités et à la pertinence de leurs missions pour  le maintien de l’ordre habituel.   

                Relativisons un peu. Tous les métiers ont leur degré de dangerosité. Il arrive que des policiers laissent leur vie au travail, des ouvriers aussi et en aussi grand nombre. Des travailleurs sociaux, des médecins et des aumôniers ont été tués par les personnes qu’ils accompagnaient.  C’est dramatique pour les uns comme pour les autres. Tout doit être fait pour que ce type d’accident soit le plus réduit possible. Toutes ces personnes ont choisi  leur métier. Elles doivent être respectées au  même degré et protégées dans l’exercice de leur fonction. Rien ne justifie que le mérite des unes soit supérieur à celui des autres.

                Gendarmes et policiers doivent aussi s’interroger sur ce qui de leur comportement suscite la haine. En effet lorsqu’ils sont reconnus dans leur fonction, la population dans son ensemble est avec eux. On l’a vu après les attentats de Charly Hebdo. Leur comportement n’est pas toujours aussi limpide. Exemple : Une semaine avant Noel, devant leur toute récente gendarmerie, les gendarmes décident d’un contrôle de vitesse. La limitation à 50 km/ h surprend, le panneau fin de village ayant été reculé de près de 500m. Aucune construction sur le bord de la route. L’automobiliste se laisse aller à la vitesse normale 70 ou 90.  Les gendarmes le savent bien, ils ne sont pas là par hasard. Le pire est à venir. Vous suivez depuis le centre du village une voiture. Elle est arrêtée et après  vérification rapide des papiers elle repart. Vous, derrière elle, vous prenez une amende et un retrait de deux points au permis. Vous demandez au gendarme pourquoi la voiture qui précède est repartie. Quel est ce passe-droit ? Parce qu’elle roulait moins vite dit-il.  Comment  peut-on aller plus vite que la voiture que vous suivez ?  Après le piège qui vous a été tendu et dans lequel vous êtes tombé par étourderie, voilà le mensonge qui arrive. Bon Noël, bonne année et bonne fête ! Et tant pis si vous pensiez que le  premier besoin du citoyen est d’être rassuré par le gendarme avant  d’être accusé.  

                Il aurait été plus judicieux de renforcer la signalisation et mettre un radar devant la gendarmerie. Le radar aurait fait  le percepteur pour les étourdis sans humilier les gens qui s’apprêtaient à fêter Noël. De plus les gendarmes mobilisés ce soir-là auraient pu se libérer et visiter le parking du grand magasin le plus près où tout un groupe profitait du moment pour dérober portables et autres objets précieux.

                Les gendarmes n’ont pas compris que s’il n’est pas nécessaire de se faire aimer pour être respecté dans sa fonction, il est tout aussi important de ne pas se faire haïr. Tout citoyen doit respecter les forces de l’ordre.  La réciproque est tout aussi vraie. Qu’il nous soit donné de percevoir le gendarme comme un protecteur et pas seulement  comme un percepteur au service de l’Etat et un piégeur du citoyen.  Il est aussi au service de la population. C’est une  bonne nouvelle, il faut qu’elle se vérifie et se répande  sur le terrain.

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1 décembre 2017 5 01 /12 /décembre /2017 10:53

           

           Désormais les chrétiens catholiques récitant le notre Père ne diront plus " Ne nous soumet pas à la tentation " mais "ne nous laisse pas entrer dans la tentation". Par souci d'œcuménisme, l'Eglise protestante Unie se joint à cette nouvelle formule. Ce choix est surprenant puisque les protestants ont une grande liberté de traduction du texte biblique, que le texte soit écrit ou  récité en public. On entend souvent "ne nous laisse pas tomber dans la tentation".  Il est dans l'intérêt du protestantisme que cette liberté d'expression perdure. La fraternité œcuménique ne doit pas harmoniser les expressions de la foi.

            Ce choix est contestable si une telle traduction doit être figée dans les textes officiels de l'Eglise. En effet "ne nous soumet pas à la tentation" ne signifie pas forcément que le Dieu va de manière tout à fait volontaire nous précipiter dans la tentation. Beaucoup l'ont compris comme une demande pour nous sortir de la tentation. Cette compréhension est beaucoup plus juste parce que dans la tentation nous y sommes déjà. Elle fait partie de la nature humaine. La tentation est liée aux passions inscrites au plus profond de chaque humain. Vouloir  écarter ces passions, c'est rejeter une part de l'humanité qui est en chacun. Les tentations sont la conséquence des passions. Ne nous soumet pas à la tentation est une parole de raison pour mettre de l'ordre dans ce monde des passions et des sentiments. Il ne s'agit pas de les supprimer mais de les réorienter afin qu'ils portent ce qui est bon pour l'humain.

            La formule "ne nous laisse pas entrer dans la tentation" ignore  et rejette la nature de l'humain qui est un être de passion. Elle voudrait que l'humanité ne sois pas soumise aux passions. Sans elles l'humain serait-il encore un humain?  La soumission aux passions est une richesse faite à l'homme.  A la condition de ne pas confondre passions et instinct. Ce dernier n'a aucune souplesse. Il n'est pas gérable. Il n'est pas ré-éducable. Tout au plus est-il possible d'agir sur les causes qui  le mettent en route.  Il est  par exemple possible d'apprivoiser un chien pour qu'il ne se jette pas sur le premier venu. Les affects  différencient  l'homme des choses et des animaux connus.  Il lui appartient d'ordonner  les passions pour qu'elle ne deviennent pas destructrices. Il les réoriente afin qu'elles portent les fruits nécessaires à la vie.  

            Les mouvements chrétiens les plus conservateurs craignent que cette nouvelle formulation porte atteinte à la souveraineté de Dieu. Dieu doit garder   le pouvoir d'éprouver qui il veut  en le précipitant dans les affres de  la tentation. La vision de Dieu qui préside à cette position, comme d'ailleurs, mais de façon moindre,  à la position précédente consistant à demander à Dieu de nous éviter la tentation, est la vision d'un  Dieu tyrannique qui distribue bons et mauvais points. C'est la vision d'un Dieu qui met l'homme sous sa tutelle et ne lui laisse d'autre liberté que celle d'obéir et de suivre.

            Nous sommes là devant une conception de Dieu très différente de celle que nous pensons trouver dans les Évangiles et dans  la raison universelle. La souveraineté de Dieu ne réside pas dans un pouvoir autocratique  mais dans sa nature même qui est  à la fois d'être en tout  et d'avoir tout en soi. Rien ne peut échapper à Dieu. Il tire son autorité de sa présence en tout lieu et en toute chose. Une telle conception de Dieu donne un tout autre sens à l'ensemble des demandes du notre Père. Elles deviennent la manifestation du désir de voir Dieu occuper l'espace et l'univers tout entier. Ces demandes répétées ont pour but premier d'entretenir ce désir. Par cette prière, Jésus ne nous demande pas de supplier le père mais de ne pas oublier que Dieu est l'atmosphère dans laquelle nous baignons. Dieu devient alors une source dans laquelle chacun peut puiser, une brise qui apporte le souffle de la vie et la tendresse dont l'humain a tant besoin. Dans le notre père, le père n'est pas seulement un papa qui apporterait la sécurité, tantôt nous félicitant, tantôt nous corrigeant. Il est le créateur de tout, présent dans cette création. Dire ne nous soumet pas à la tentation, c'est dire je ne veux pas me sentir hors de Toi. N'est-ce pas ce que  veut dire Jésus lorsqu'il dit à ses disciples: "veillez et priez afin que vous ne tombiez pas en tentation"?

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8 novembre 2017 3 08 /11 /novembre /2017 22:09

 

             Les chrétiens, pour citer la bible, leur livre de référence, parlent de "la Parole de Dieu". Cette expression est paradoxale dans la mesure où une parole est orale alors que la bible est un écrit. Elle vise à donner à la bible une autorité particulière en lui assignant un caractère divin. Notons toutefois que de nombreux chrétiens refusent d'utiliser cette expression prétextant que le "dire de Dieu" ne peut se réduire à des textes. Pour eux il n'y a pas de textes sacrés autrement dit d'écrits venant directement de Dieu. Tout texte est une création humaine soumise à l'interprétation des lecteurs. Un texte se lit, une parole s'écoute. La parole n'est pas seulement un langage, une suite de mots et de phrases. Elle est ce que j'entends, ce que je comprends. Elle est au-delà du texte et ne se laisse pas enfermer en lui.  Pour le croyant Dieu parle non seulement dans le livre mais aussi dans la nature, dans l’événement, dans la parole des autres. Cette parole est toujours individuelle parce qu'elle sollicite la pensée, la mémoire et l'intelligence de chacun.

            C'est ce que l'auteur du quatrième Évangile, l'apôtre Jean, a voulu signifier en écrivant que la Parole a été faite chair.  Elle pénètre chacun individuellement. Avec le Christ la parole est presque reçue dans sa totalité, c'est ainsi que beaucoup ont vu en lui un fils de Dieu.  La parole crée l'homme Jésus comme la Parole selon le mythe de la Genèse a créé le monde. Jésus prendra soin de dire qu'il n'est pas Dieu en faisant remarquer que seul Dieu est parfait. Tout humain peut recevoir la parole autrement dit tout humain peut recevoir Dieu en lui. Jamais toute la parole, jamais Dieu dans sa totalité. Comment le pourrait-il si Dieu est infini. Il ne peut y avoir qu'un Dieu mais il y a du Dieu en tous. Jésus le Christ est bien la preuve que cette présence de Dieu en soit est possible et que plus elle est forte, plus le monde change, plus il s'approche d'un royaume inconnu mais pressenti parce qu'il correspond à ce dont l'humain aspire au plus profond de lui: un royaume de paix, de liberté et de vérité. Le Royaume n'est pas ailleurs il est déjà là. La résurrection de Jésus peut-être interprétée comme un démenti des affirmations selon lesquelles le royaume n'est possible qu'après la mort, dans un autre monde. Il apparait bien vivant dans ce monde-ci et pour l'époque à ceux qui sont considérés comme les plus faibles et les moins crédibles: les femmes. Aujourd'hui une place autre est heureusement faite aux femmes, mais des faibles, des rejetés,  il y en a toujours dans ce monde. 

            L'apôtre Paul dans ces épitres ne dira pas autre chose lorsqu'il écrit que la mort est vaincue. "O mort, où est ta victoire? O mort, où est ton aiguillon?". Il continue disant que l'aiguillon c'est le péché autrement tout ce qui s'oppose à la vie et l'entrave.  L'homme peut donc rester sur terre.  La résurrection est  une invitation à ne pas fuir hors de la terre, au ciel par exemple,  pour y trouver ce que l’homme ne trouve pas dans ce monde. Quant à la victoire, elle est donnée par Jésus Christ, autrement dit par la "Parole" de Dieu en nous. La victoire est possible ici même. Quitter ce monde pour la trouver serait une défaite puisque le Christ est venu.  La présence de Dieu en tout être est une réalité. Le royaume est possible ici et maintenant parce que la parole est créatrice lorsqu'elle est entendue. 

            Lors d'une  lecture en commun chaque écoutant doit pouvoir entendre la parole qui lui est adressée personnellement. Vouloir faire du texte écrit la Parole de Dieu c'est empêcher l'écoutant d'entendre ce qui lui est adressé, c'est neutraliser sa pensée, renier ce qu'il est, ne pas le reconnaitre comme individu. Et s'il doit y avoir une route commune, cette route n'est pas définie par le texte écrit appliqué à la lettre, elle est définie par les échanges sur ce que chacun a entendu. Ces échanges contribuent à la construction et à la définition de l’Église.  

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23 octobre 2017 1 23 /10 /octobre /2017 09:03

 

            Les trois religions monothéistes se réfèrent à un livre: la Thora pour les juifs, la bible pour les chrétiens et le Coran pour les musulmans. Pour la plupart ce livre est considéré comme sacré. Beaucoup de protestants refusent ce terme pour qualifier la bible.  La pratique en fait toutefois un livre sacré. Il est la base quasi exclusive de la liturgie et du culte.  La constitution de ces livres s'est faite sur plusieurs années. Plus de cinq siècles pour l'Ancien testament, un siècle pour le nouveau et au moins deux siècles pour le Coran. Les livres ne sont pas tombés du ciel, ils sont faits de mains d'hommes. A la base il y a eu un ou plusieurs hommes : pour la Thora Moise et les prophètes, pour les Chrétiens , Jésus et les apôtres, pour le Coran Mahomet et d'autres encore. Ces hommes disent avoir reçu, d'une manière ou d'une autre, ces textes par révélation ou par inspiration à l' exception de Jésus qui comme Socrate trois siècles avant lui n'a jamais écrit ou prétendu recevoir directement des dieux ce qu'il avait à dire. Les apôtres comme Paul dans ses épitres feront la différence entre ce qui vient d'eux et ce qui vient de Dieu.

            Au cours de l'histoire, ces textes ont souvent été mis à mal, non seulement pour leur interprétation mais pour la place acquise ou non au sein du canon. De nos jours, celui-ci  parait de moins en moins contesté. Les textes qui y sont insérés sont l'assise indispensable à la stabilité de la religion qu'ils représentent. Seuls quelques chercheurs s'intéressent aux textes non canoniques. Tout l'enjeu est l'interprétation des textes. A travers les diverses interprétations chaque religion veut montrer qu'elle est la plus conforme à la vérité , à la modernité et à l'espérance des humains. Certains pensent que ces interprétations conduiront à un moment donné à une vision et une réconciliation de toutes les religions.   Nous en sommes encore loin, mais ce désir d'une religion universelle est un puissant moteur pour lutter contre les intégrismes de tout bord et pour rapprocher croyants et incroyants au nom d'un humanisme commun à tous. Le dialogue inter religieux est devenu un cheval de bataille pour une paix universelle.

            Jusqu'à la fin du siècle dernier les religions considéraient qu'à travers ces textes Dieu s'adressait aux hommes et les guidait dans le droit chemin pour ceux qui voulaient le suivre.  Il y avait les lois de Dieu, elles étaient irréfutables. Elles passaient largement avant les lois des hommes. Ces lois façonnaient la société et indiquaient la manière de vivre. Elles étaient le plus souvent appliquées avec contrainte, parfois avec violence. L'Eglise du moyen âge s'est  ainsi déshonorée. Aujourd'hui certaines branches de l'islam sont tout aussi cruelles pour appliquer la charia selon leur interprétation.  En Birmanie ce sont les bouddhistes qui persécutent les  musulmans.  Ne nous laissons pas aller toutefois au pessimisme. Il est évident que dans de nombreuses régions du monde les choses se sont améliorées. Les droits de l'homme sont reconnus dans de nombreux pays et s'ils ne sont pas toujours respectés reconnaissons qu'ils modèlent nos sociétés tout particulièrement pour ce qui est du monde occidental.  L'abolition de la peine de mort, le droit à l'avortement ou encore le mariage pour tous en témoigne sans oublier le combat pour le droit des femmes présent dans de nombreux pays.

            Dans un interview au Nouvel observateur l'islamologue Rachid Benzine regrette que le mouvement féministe musulman cherche à s'appuyer sur quelques versets choisis du coran comme si ceux-ci "contrôlaient l'ensemble du corpus textuel" ou comme s'ils avaient été mal interprétés jusqu'à aujourd'hui. Selon lui, ces féministes font de Mahomet un féministe avant l' heure alors que les textes du Coran sont truffés de normes patriarcales selon lui.  Pour l'auteur - avec le rabbin Delphine Horvilleur, de "des milles et une façon d'être juif ou musulman", vouloir à tout prix "magnifier" le texte et "sauver Dieu" pose un problème de méthodologie. Une déconstruction des textes est absolument nécessaire dans un premier temps afin de saisir et comprendre la norme du contexte social, politique et historique dans lequel le texte a été produit. Cette déconstruction permet de quitter le texte pour ne pas enfermer l'émancipation  voulu par le féminisme dans le religieux uniquement .

            La remarque de l'islamologue concernant  le féminisme en milieu musulman peut-être étendue à la relation des chrétiens avec la bible, tout particulièrement pour les protestants qui font de cette relation le fondement de leur foi. Les exégètes cherchent à défendre le texte, à le justifier quitte à lui donner une interprétation très lointaine de ce qu'il semble dire. C'est particulièrement vrai avec les épitres où la pensée de Paul, sur les femmes par exemple,  va à l'encontre des droits de l'homme.  Chez les chrétiens , ce comportement  va de pair avec leur volonté à vouloir "sauver Dieu  et Jésus-Christ" en cherchant à éliminer tout ce qui cherche à les discréditer, oubliant au passage que ce n'est pas l'homme qui sauve Dieu mais Dieu qui sauve l'homme comme le suggèrent  avec force les Evangiles. Si les chrétiens ne se réfèrent plus au blasphème comme le fait l'islam,  leur attitude correspond parfois à la lutte contre le blasphème. Dans le domaine de l'art tout particulièrement, ils interviennent afin d'interdire ce qui n'est pas conforme aux habitudes religieuses.

            Dépassons la pensée de Rachid Benzine. En effet, s'il affirme que le texte ne porte pas en lui-même l'émancipation , on peut se demander pourquoi il faut le privilégier de manière aussi exclusive que ne le font les religions. Est-il nécessaire de s'y référer systématiquement lorsque des positions nouvelles doivent être prises? Je me souviens de ce conférencier qui au sujet de l'abolition de la peine de mort refusait de chercher à la justifier par des passages tirés de la bible ou par les décrets des religions.  Elle "doit être- disait-il en se référent à Cesare Beccaria qui a été  au 18eme siècle un des premiers juriste à renoncer au modèle de l' Eglise,  parce qu'elle nous est commandée par l'humanité elle-même sans en passer par Dieu".  L'actualité lui donnait raison. Beaucoup de chrétiens étaient et sont encore  pour la peine de mort. Elle est toujours en vigueur dans de nombreux pays où la lecture des livres dits "saints" fait partie des habitudes. Aux U.S.A elle est en vigueur dans de nombreux états à majorité chrétienne. Quant aux pays musulmans elle y apparait tout à fait naturelle. En France, l' ACAT, association contre la torture, a mis plusieurs années pour prendre position contre la peine de mort alors qu'Amnesty international sans références religieuses explicites, militait pour son abolition. Les décisions à prendre pour répondre à la modernité n'ont pas toutes besoin d'être confrontées aux textes religieux. Ils ne disent rien sur les possibilités d'une modernité qu'ils ne connaissaient pas. Or cette absence de connaissance donne lieu a des interprétations conservatrices, parfois délirantes y compris lorsqu'elles sont examinées de manière collégiale , par la hiérarchie comme dans l' Eglise catholique qui s'oppose encore à l'avortement, à la PMA, à la GPA, au mariage pour tous... Elle s'exprime à mots couverts sur la contraception , elle maintient le culte des morts.

            Osons le dire, les textes dit sacrés ne sont pas les seuls utiles et nécessaires à la guidance de l'humain. Comme tant d'autres textes ils entrent dans un ensemble de données qui nourrissent la pensée et conduisent à prendre les décisions utiles pour l'élévation de l'homme.  Par ailleurs notons qu'ils ne sont pas le seul accès possible à Dieu. Ceci fait l'objet d' un autre développement.

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6 octobre 2017 5 06 /10 /octobre /2017 15:14

 

               En parlant de victoire de la culture du néo protestantisme au sujet de l'élection d'Emmanuel Macron, Régis Debray n'a pas convaincu tous les protestants. Certains l'accusent de ne pas connaitre en profondeur le protestantisme français, bien différent du protestantisme américain. Pour le philosophe, le Président Macron est porteur de nombreuses attitudes caractéristiques du monde protestant. De Luther soucieux de son salut, il aurait retenu l'examen de conscience qui pousse à la transparence et à la moralisation du politique. De Calvin il aurait pris cette idée forte selon laquelle les intermédiaires ne sont pas utiles puisque tout homme peut "se brancher directement sur le Saint Esprit". De Max Weber , il retient la rigueur et la valorisation du travail au service de l'économie. Pour couronner le tout, le président de la république se réfère à Paul Ricœur avec qui il a travaillé. De lui il retient l'importance du dialogue et du compromis. De là viendrait le fameux en même temps qui permet de penser ensemble les choses les plus hétérogènes comme la libération du travail et la protection des précaires.

            Les remarques de Régis Debray semblent pertinentes. Les Protestants Réformés se plaisent à maintenir une tension entre les oppositions afin d'arriver à un compromis ainsi enrichi. Mais ils retiennent aussi le "ou bien ou bien" de Kierkegaard qui invite à choisir et auquel les protestants se réfèrent au nom du libre arbitre. Par ailleurs, des théologiens avertis tiqueraient sur les extrapolations faites à partir de quelques éléments de la pensée des Réformateurs. Le champion de la transparence et de la moralisation est un certain François Bayrou qui bien que s'intéressant au pays de Navarre ne se réclame pas du protestantisme. Les catholiques connaissent aussi l'examen de conscience y compris sous d'autres formes que celles connues et pratiquées dans les milieux protestants. Chez Calvin le Saint Esprit est là pour éclairer les Ecritures afin que chaque lecteur retrouve la liberté de l'interprétation loin des pensées obligées des clercs. Il n'est pas certain pour autant que le Saint Esprit justifie toute mise à l'écart des corps intermédiaires !

            Notons que Régis Debray reprend ici la thèse de Mark Alizart dans son livre la pop théologie. L'auteur y fait l'inventaire des domaines où la pensée protestante s'est imposée pour être à l'origine des situations actuelles. Désormais nous serions tous des protestants y compris lorsque nous ne le croyons pas!

            Régis Debray ne prend pas en compte les conséquences de l'œcuménisme à savoir la convergence du protestantisme avec le catholicisme. Cette conséquence est confirmée par les enquêtes. Dans les pays d'Europe comme aux Etats Unis, les protestants se considèrent , parfois jusqu'à 80 %, similaires à tous les chrétiens. Ce taux baisse au dessous des 60% chez les catholiques, probablement de par l'importance de leur rites et des dogmes qui restent figés et très spécifiques. De plus en plus nombreux sont les chrétiens pour qui le schisme de plus de cinq siècles est terminé. Pour eux les grands clivages dogmatiques sont atténués, en voie d'être dépassés. Un compromis semble se dessiner pour ce qui est du salut entre les partisans de la bible et des Ecritures d'une part et les partisans de l'Eglise et les traditions d'autre part. Ainsi ce ne sont pas les catholiques qui se protestantiseraient comme semble le dire le notre philosophe mais l'inverse. Le crédo catholique deviendrait celui des protestants par manque d'affirmation et de détermination de ces derniers. Quand il n'est pas d'accord, le protestant ne s'oppose pas, il écoute et se tait.

            Les deux analyses ne s'excluent pas. Debray comme  Mark Alizart ont raison si on considère l'évolution de la société. Cette évolution a fait sienne la plupart des idées fortes du protestantisme. Celui-ci apparait comme une passerelle du religieux à la laïcité. Il est une porte ouverte sur la modernité . Il invite à sortir de nos frontières , celles de la religion, du pays, des institutions, d'une morale figée et immuable, d'habitudes jugées d'un autre temps, mal adaptées au monde actuel. La société c'est donc "protestantisée". Elle est devenue moins religieuse malgré les apparences voulues par des intégristes de tous bords. Elle n'est plus soumise à l'autorité d'un Dieu mais aux droits de l'homme .

            Il en va tout autrement de la religion chrétienne proprement dite. Ici les détracteurs de Régis Debray sont plus près de la réalité. Les protestants de par leur souci d'unité et de fraternité semblent s'être rapprochés des catholiques. Leur esprit d'ouverture, de tolérance, leur souci de faire confiance à l'autre pour qu'il choisisse lui-même et accède à sa singularité les ont empêché d'affirmer clairement leurs positions. Certes ils n'ont pas opté pour le culte des reliques, l'adoration des saints, l'obéissance au pape et le culte marial mais leur silence ne permet plus de les reconnaître. "Catholique ou protestant, c'est pareil" disent ceux qui ne fréquentent pas les Eglises et ne mènent aucune réflexion sur les sujets de la foi. Dans le protestantisme dit évangélique, c'est l'éthique catholique qui est reprise tout particulièrement en ce qui concerne la famille. On s'oppose à l'avortement, au mariage pour tous, à la contraception.  On récupère le salut par les œuvres puisque la foi devient une œuvre obligatoire pour être sauvé.

            L'œcuménisme a cru que la fraternité passait par une imitation de l'autre. Dire son désaccord sur telle ou telle attitude d'une autre religion est devenu religieusement incorrect. C'est probablement une erreur. Respecter, apprécier et aimer son prochain, ce n'est pas chercher à lui ressembler. C'est se réjouir ensemble des différences et de la diversité. Vouloir annuler ces différences, c'est annuler la joie d'être ensemble.

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31 juillet 2017 1 31 /07 /juillet /2017 17:03

         

            Il est tout à fait possible pour un chrétien d’accepter sa religion telle qu’elle est, de croire ce qu’elle dit et de pratiquer selon les habitudes communes à tous.  Il peut même être convaincu personnellement du contraire de ce que son Eglise professe tout en la suivant dans sa pratique. C’est ainsi que l’Eglise est encore sollicitée pour les baptêmes, les mariages ou les enterrements. Les demandeurs sont peu convaincus mais sacrifier à une tradition est une nécessité pour eux pour faire comme tout le monde, peut-être aussi  par superstition, celle-ci témoignant d’une interrogation à la fois profonde et non exprimée. Prêtres et pasteurs ne sont pas dupes, ils parient sur cette interrogation pour faire passer le message sur l’intérêt d’une vie spirituelle.

            Il y a des chrétiens, convaincus que la bible ne tombe pas du ciel et que l’Eglise, avec ses dogmes et ses rites, est une construction humaine, qui  fréquentent régulièrement l’Eglise et participent à ses activités. Ils  ne croient pas au surnaturel tout en se comportant comme s’ils y croyaient. Ils se placent dans une situation d’attente impossible à vues humaines.  Pour eux, les avancées de la science démentent clairement ce que dit leur religion et pourtant, ils font comme si tout cela était vrai.

            Ces chrétiens sont-ils pour autant des imposteurs ? Ce serait méconnaître et nier la complexité  de la nature humaine que de s’en tenir à un tel jugement. Ils ne sont pas dans une attitude d‘imitation ou pire encore, de singerie,  ils hésitent entre prendre parti pour la réalité qu’ils reconnaissent sans le moindre doute et un « on ne sait jamais » qui les interpelle avec malignité. Ce décalage entre ce qu’ils savent de la réalité et ce qu’ils pratiquent n’a rien à voir avec par exemple l’attitude d’un protestant qui participant à un office catholique, fera le signe de croix ou se tournera vers la vierge Marie pour faire comme tout le monde ou par amitié avec ses amis catholiques. Il s’agit dans ce cas d’une imitation conventionnelle qui n’interroge en rien la foi ou la non- foi de celui qui pratique occasionnellement ce geste imitatif.

            Il est toujours possible de répéter un geste rituel sans qu’il traduise pour autant une aspiration profonde et cachée, une sorte de mimétisme superficiel et sans suite. Dans ce cas il n’y a pas de croyances à prendre en compte. Intéressons-nous aux deux possibilités de ceux qui restent fidèles à leur religion sans croire ce que celle-ci professe.

            Notons dans un premier temps que la religion peut servir le  merveilleux dont l’homme a besoin. Elle remplit alors le rôle de la science-fiction. Ainsi, il est tout à fait possible que des chrétiens, bien qu’au courant et convaincus des découvertes concernant la formation de la bible, la nature de Dieu et les dogmes des Eglises, se plaisent à vivre la religion comme un roman de science-fiction. Dans ce cas, leur présenter les Ecritures comme une œuvre, ou Dieu comme une conception humaine, leur est insupportable. Ils ne sont pas niais, ils ont fait un choix. Ce choix pourrait se comparer au choix de ceux qui ont choisi de fumer et qui savent pertinemment que le tabac tue. Ils ont besoin de tabac comme eux ont besoin de croyances loin de toutes réalités.

            Le plus vraisemblable pour ces chrétiens pratiquants mais convaincus que la réalité est tout autre, reste toutefois leur difficulté à anticiper une conception des données de la foi autre que celle qu’ils connaissent. Pour eux il n’est pas imaginable que l’on puisse repenser Dieu, Le Christ, les dogmes et les traditions qui ont fondé la religion chrétienne. Dire que la bible est  œuvre humaine, que le Christ est un homme, que Dieu se manifeste par la nature qui nous entoure, qu’il n’y a pas de surnaturel, que Dieu n’est pas un être suprême mais une présence dans la nature, c’est sortir de la religion. Selon eux il n’y a pas d’autres manières d’envisager la religion chrétienne. Celle-ci ne peut se manifester qu’au travers de l’Eglise. Relativiser les écrits de la bible c’est les rejeter, remettre en cause les dogmes et les traditions c’est renier sa foi. C’est ainsi que loin de renouveler la religion ces chrétiens qui auraient la possibilité de participer à ce renouvellement entrent dans la tradition.

Tout notre travail est de rassurer ces chrétiens sur le fait qu’il est possible de penser les fondamentaux de leur foi sans pour autant renier celle-ci. Leur montrer qu’ils ont tout à gagner à faire de leur foi une création personnelle qui les fera entrer dans la sphère de la liberté et de la joie. La religion cessera alors d’être une croyance simplement pour devenir le chantier de la vie à construire, la sienne et celle des autres.  

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11 juillet 2017 2 11 /07 /juillet /2017 09:01

 

Bonjour François,

            J’ai bien rit ce matin en ouvrant mon journal. En effet j’apprends que le Vatican refuse l’hostie sans gluten et tant pis pour les allergiques. Ils auront droit à l’hostie allégée mais pas question de prendre du sans gluten. La raison en est que pour être transformée en corps du Christ il y faut du gluten.  Apprenant cela, je me suis rué sur le résultat des prélèvements sanguins auquel j’ai droit depuis de long mois pour cause de maladie grave et je n’ai vu aucune trace de gluten dans mon sang. Ceci dit, l’affaire est un peu faussée puisque comme  chacun sait, il n’y a pas de transformation du pain en corps charnel chez les protestants. Impossible donc de déceler par analyse s’il y a eu gluten ou pas permettant au pain de devenir corps. J’ai toujours trouvé admirable que notre organisme, suivant qu’il est catholique ou protestant décèle s’il faut transformer le pain en corps du Christ !   

            Ce que je trouve de plus étrange encore est que ce même Vatican décrète que les OGM soient autorisés, sans doute parce que transformable en corps du Christ. Et peu importe s’il y a des doutes sur l’effet des OGM sur la santé. Les cardinaux semblent privilégier le dogme de la transsubstantiation à celui de la bonne santé et aux recommandations scientifiques.

            Un point positif tout de même. Le vin peut être remplacé par du mout sans alcool. Ouf, les anciens buveurs n’auront pas à transgresser l’ordre médical de ne plus toucher à l’alcool afin de ne pas se laisser entrainer à se re-alcooliser. Il est vrai que l’eucharistie ayant la plupart du temps lieu  sous une espèce seulement, l’affaire ne concerne que les prêtres. Ici encore je suis étonné que le vin rouge ne soit pas obligatoire, il parait  tellement plus près du sang.  

            Bien sûr rien de sérieux dans tout cela. Je  n’ai aucune envie d’entrer dans de telles discussions. D’abord par respect aux catholiques qui sont libres   de croire ce qu’ils veulent. Il en est ainsi de toutes les religions aux conditions qu’elles ne cherchent pas à  imposer leurs vues à la société et qu’elles respectent le cadre défini par la  république.  Ensuite parce que je ne partage pas cette théologie de l’eucharistie. Elle fait débat depuis plus de 2000 ans et en toute liberté j’ai choisi une option autre. Enfin parce que ces considérations me paraissent désuètes et d’aucune utilité aux vues des préoccupations de nos contemporains.

            Ceci dit la liberté exige que je puisse m’exprimer à ce sujet. D’abord pour ne pas que de telles préoccupations s’imposent à tous faute de réactions. Si personne ne dit rien c’est parce que c’est juste penseront ceux qui ne sont pas enclins à la réflexion sur le sujet. S’installent alors des habitudes qui peuvent être très dommageables sans jamais remettre en question des pratiques installées. Enfin l’humour laisse une porte ouverte à une multiplicité d’interprétations. Il invite ainsi que tout propos soit pris pour une condamnation. Le propos sera pris au sérieux pour les uns, comme un calembour pour les autres. L’humour protège la liberté de celui qui s’en nourrit.

            Ce qui m’interroge le plus et, pour en finir avec cette correspondance, c’est l’image du christianisme que de telles décisions donnent à celui qui lui est extérieur. Que peuvent-elles lui apporter d’utile dans sa vie ? La religion et la foi, devraient, me semble-t-il, aider l’homme à se construire et acquérir la liberté comme le fait Jésus tout au long de l’Evangile. Je ne vois pas en quoi l’hostie avec gluten obligatoire et les OGM possibles y contribuent. J’ajoute qu’il n’est pas question ici de remettre en cause la théologie de la transsubstantiation à laquelle n’adhèrent pas les protestants. Il s’agit de faire prévaloir la raison sur la superstition pour ce qui est de la vie quotidienne actuelle. On peut comprendre que les dogmes établis il y a plusieurs siècles sur les connaissances  de leur époque, ne puissent pas être remis facilement en question ne serait-ce que par respect envers ceux qui les ont pensé. Il est incompréhensible que des chrétiens responsables et cultivés ne puissent pas prendre en compte les données d’aujourd’hui pour définir les nouvelles possibilités de vivre la foi. Une foi apportant l’épanouissement à l’humain.      

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10 juin 2017 6 10 /06 /juin /2017 11:23

 

          Après plus de six mois de chimio thérapie où les cures se succèdent à un rythme épuisant et où la fonctionnalité de la plupart des organes du corps est en souffrance donnant trop souvent le sentiment que la vie va s'arrêter, je me plais à lire et relire la lettre à Ménécée : "la mort n'est rien pour nous puisque , tant que nous existons nous mêmes , la mort n'est pas, et que , quand la mort existe, nous ne sommes plus". Epicure y soutient que la mort n'est pas à craindre , que hors de la vie, il n'y a rien de redoutable. Pour lui, la connaissance de cette vérité nous rend capable de jouir de cette vie mortelle.

        Au moment où la maladie nous pousse à désinvestir le monde, à nous replier sur soi et à renoncer à jouir de la vie , les propos du fondateur du jardin sont une véritable thérapie. Ils nous invitent, non point à nous préparer à la mort mais à vivre pleinement chaque instant, comme si tout était normal, avec les moyens qu'il nous reste. Il fut lui-même un témoin et un exemple puisqu'il souffrit toute sa vie de maladies chroniques et douloureuses qui l'emportèrent. Deux cents ans plus tard le poète Horace exprimera cette pensée dans son fameux vers épicurien " carpe diem, quam minimun credula postero" (cueille le jour sans te soucier du lendemain). Comment ne pas penser aux paroles de Jésus :"Regardez les oiseaux du ciel, ni ne sèment ni ne moissonnent, ils n'amassent rien dans les greniers mais votre père céleste les nourrit". Et Jésus d'ajouter: "qui de vous par ses inquiétudes peut ajouter une coudée à la durée de sa vie". Il s'agit bien ici de laisser venir la mort sans s'en soucier. La Réforme exprimera la même pensée avec son " sola gracia" (seulement la grâce). Dans tous les cas il s' agit bien de libérer l'homme de la mort et de l'après la mort pour lui redonner la liberté de vivre pleinement sa vie avec le plus de bonheur possible.

       Certains s'offusqueront, fidèles aux traditions et aux dogmes de l'Église plus qu'aux évangiles, de ce que tout soit centré sur la vie terrestre et que soit ignorée la vie Eternelle la porte en étant la résurrection de Jésus. " Si Jésus n'est pas ressuscité alors notre prédication est vaine écrira l'apôtre Paul aux corinthiens". Autrement dit ici, pourquoi la lecture de la lettre à Ménécée d'Epicure serait-elle plus réconfortante et se substituerait à l'épitre de Paul aux corinthiens?

Soyons raisonnables. Une lecture n'exclut pas l' autre. Les deux sont profitables. Elles ont un point commun, chasser l'angoisse devant la mort. Leur démarche est différente.

      -Dans sa lettre à Ménécée, plus de trois cents ans avant celle de Paul, Epicure a une méthode que nous pourrions dire curative. Elle consiste à libérer l'homme des fausses opinions selon lesquelles il y aurait un au-delà et des dieux, s'intéressant aux hommes, maîtres de cet au-delà. La croyance en de telles fausses vérités trouble l'homme et le conduit à redouter la mort et désirer l'immortalité. Or, la consolation et la paix passent par l'ataraxie, autrement dit l'absence de trouble et par une ouverture au présent avec l'accueil des petits et des grands moments de la vie. Le tout avec joie. La mort n'est pas à craindre puisque la souffrance liée aux sensations et à la conscience disparait dès que le dernier souffle est rendu. Pour Epicure, l'âme et le corps, sont constitués d'atomes qui à la mort et après décomposition, rejoignent d'autres atomes pour une nouvelle composition.

      -Pour l'apôtre Paul, la consolation passe par une espérance à la vie Eternelle. Celle-ci n'est pas la continuité de la vie ici bas. Elle n'est pas "immortalité". Elle est une vie autre, dans un monde autre. Une vie céleste, débarrassée des affres et des servitudes de la vie terrestre. Telle est en tout cas l'interprétation que l'Eglise, docile au désir des hommes, a donné aux textes du Nouveau Testament. Cette espérance en une vie éternelle, campée dans un personnage identique à celui que nous étions durant de la vie terrestre, attestée par la résurrection du Christ, est sensée chasser l'angoisse. Ce n'est pas une croyance. C'est, insiste Saint Paul, une réalité basée sur le Christ ressuscité. Une simple croyance, n'aurait pas traversé les siècles selon de nombreux penseurs. Il fallait une preuve matérielle.

      Pour justifier une telle preuve, les chrétiens ont fait de la résurrection un événement historique. De nos jours, les progrès de la sciences, les nouvelles découvertes et l'ensemble des connaissances, rendent difficile la croyance en un événement aussi surnaturel. La sagesse nous conduit à penser la résurrection comme une parabole invitant les vivants à rebondir sans cesse tout au long de la vie et à choisir ce qui va de l'avant sans attendre une nouvelle vie après la mort. La nouvelle vie commence ici, sur cette terre. Chaque jour est un recommencement. Nous y sommes déjà dedans. La mort n'est plus rien. La résurrection est une invitation à se renouveler perpétuellement ici bas parce qu'il n'y a pas d'ailleurs. L'homme est déjà intégré dans ce mouvement, la mort ne peut pas l'en arracher comme c'est le cas dans la pensée d'Epicure pour qui les atomes du corps et de l'âme rejoignent la matière de l'univers pour une nouvelle composition. Autrement dit, la signification de la résurrection rejoint ici la pensée d' Epicure. Les deux nous invitent à jouir de la vie sur cette terre, débarrassés de la crainte de la mort. Quand celle-ci arrive, nous ne somme plus là, elle n' est donc rien selon Epicure. La résurrection se substitue à la mort dès maintenant et renouvelle sans cesse la vie selon les Evangiles.

      Il ne reste plus au malade que je suis, épuisé par la chimio, menacé par la mort que, trop souvent, j'imagine proche, non pas à me battre comme le propose le premier venu, mais à faire confiance à cette force qu'est Dieu. Cette force n'est pas volontaire, elle n'a pas d'intention particulière. Elle n'est ni à craindre ni à supplier . Elle est disponible pour que je vive au mieux les jours qui me sont donnés à vivre. Je ne suis pas le maitre de ma vie. Personne ne l' est. Traitement et soins sont une lutte contre tout ce qui entrave la vie. Ils sont l'espoir que la maladie se retire encore cette fois.

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Qui suis-je ?

     Titulaire d'une maitrise de théologie et d'un DESS de psychopathologie clinique, j'ai été amené à exercer plusieurs fonctions  et plus particulièrement la mise en place d'un centre socio- culturo- spirituel protestant puis la direction pendant 12 ans d'un centre de cure pour malades alcoliques. J'y ai découvert l'importance d'apprendre à écouter l'humain dans toutes les dimensions qui le constituent. Aujourd'hui, inscrit au rôle des pasteurs de l' Eglise Réformée de France, j'essaie de mettre des mots sur mes expériences et de conceptualiser mes découvertes.
serge soulie

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